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Full text of "Specimen des caractères de la fonderie de N. P. Gando à Paris et de son fils Th. S. Gando à Bruxelles"

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I 


SPECIMEN 

DES 

CARACTÈRES 

DE  LA   FONDERIE  DE 

N.  P.  GANDO 

À   PARIS 
ET  DE  SON  FILS 

TH.  S.  GANDO 

À   BRUXELLES. 


À  HAARLEM 

CHEZ  JOH.  ENSCHEDÉ  EN  ZONEN 
MDGCCCXVIL 


AVANT-PROPOS. 


/6^/ 


De  la  Fonderie  de  caractères  des  Gando's  il  nous  est  peu  connu.  La  famille 
est  d'origine  suisse.  Jean  Louis  Gando,  qui  avait  établi  une  fonderie  à  Belle 
au  dix-septième  siècle  la  transportait  à  Paris  au  comme?icement  du  dix- 
huitième  siècle. 

Son  neveu  Nicolas,  fils  de  son  frère,  né  à  Genève  et  décédé  à  Paris  en 
iy6y,  continuait  les  affaires  et  les  agrandit  considérablement  en  i y 58  par 
l'aclmt  de  la  fonderie  de  Claude  Lamesle. 

Le  dit  Nicolas  s'était  associé  avec  son  fils  Pierre  François  Gando,  né  à 
Genève  en  iyS3,  décédé  à  Paris  en  i  800 ,  qui  laissait  les  a ff car  es  en  con- 
dition florissante  à  son  fils  Nicolas  Pierre. 

On  ignore,  si  les  situations  politiques  ont  eu  une  infiiœnce  défavo- 
rable sur  les  affaires  ;  néanmoins,  tandis  qu'il  continuait  les  affaires  à  Paris, 
son  fils  Théodore  Simon  Gando  s'établit  en  {8i8  à  Bruxelles  comme  fon- 
deur de  caractères. 

Au  commencement,  cette  fonderie  bruxelloise  avait  sans  doute  peu  d'im- 
portance, car  les  assortiments  furent  fondus  à  l'aide  des  matrices  que  le  père 
fournit  au  fils. 

Après  le  décès  de  Pierre  Nicolas  l'inventaire  fut  transporté  à  Bruxelles, 
et  hélas  les  anciennes  matrices  vendues  comme  vieux  cuivre  à  l'exception  de 
quelcjues  assortiments. 

C'était  pourcpioi ,  lorsque  la  maison  Jean  Enschedé  et  fils  achetcdt  en  i83y 
la  fonderie  entière,  on  ne  trouvait  que  des  assortiments  de  date  plus  récente 
que  la  Révolution  Française ,  à  l'exception  de  deux  assortiments  grecs, 
provenant  de  Lamesle. 

Il  serait  chose  diffcile  de  se  faire  une  bonne  idée  du  matériel,  que  la 
fonderie  de  Gando  possédait  pendant  les  périodes  différentes. 

Le  premier  spécimen  de  caractères  que  nous  connaissons,  fut  imprimé  en 
iy45  sous  le  titre  de  „Epreuve  des  caractères  de  la  Fonderie  de  Nicolas 
Gando.  A  Paris,  Cloistre  Saint  Julien  le  Pauvre,  près  la  Rue  Galande'\ 

Il  n'y  a  pas  de  préface  et  le  texte,  qu'on  a  choisi  pour  les  48  différents 
types  romains  et  itcdiques,  ainsi  que  pour  les  f  5  lettres  doubles  est  sans  va- 
leur pour  nous,  ne  contenant  aucune  particularité,  concernant  l'histoire  de 
l'établissement . 

A  ce  spécimen  de  caractères  en  a  ajouté  une  série  de  fleurons  bien 
remarquxxble,  intitulée:  „Recueil d'ornements ,  qui  comprennent  les  différentes 
combinaisons  des  Vignettes  de  la  Fonderie  de  N.  Gando.  Précédé  d'une  Table 
de  ces  mêmes  Vignettes,  qui  fcdt  connaître  sur  le  champ  leur  quantité  et  leur 
figure  et  s'éclaircit  sur  l'usage  qu'on  en  a  fait  dans  ce  Recueil. 

Le  cadre  de  ce  Titre  sert  ici  comme  de  Préliminaire  à  ce  genre  d'ou- 
vrage. fy45'\ 


La  Table,  qui  suit  alors,  montre  en  /  o  corps  /  07  différentes  Vignettes, 
montrant  à  22  pages  les  compositions  les  plus  compliquées.  Tout  cela  est 
bien  intéressant  pour  faille  connaître  le  goût  de  ces  temps,  mais  il  nous 
laisse  dans  F  ignorance  quant  au  graveur,  par  lequel  les  poinçons  ont 
été  gravés. 

Quelques  feuilles  volantes  avec  des  types  nouvelles  nous  informent 
qu'elles  ont  été  gravées  par  Gando  le  jeune.  Rue  Saint  Jacques,  qui  n'est 
autre  que  Piéride  François  Gando,  le  fils  de  Nicolas. 

Le  matériel  a  reçu  une  grande  augmentation  en  i-jbS  à  cause  de  V achat 
de  la  fonderie  de  Claude  Lamesle,  qui  exerçait  son  industrie  d'abord  Rue 
Galande  près  de  ki  Place  Maubert,  et  plus  tard  dans  une  rue  voisine  pi'ès 
de  la  même  place. 

Cette  fonderie,  établie  par  Lamesle,  avait  acJieté  en  lySy  l' inventaire  de 
rétablissement  de  Cot  et  en  même  temps  augmenté  énormément  son  inventaire. 

Jean  Cot  s'établit  en  iSyo  à  Parais  comme  fondeur  de  caractères  et  ache- 
tait plusieurs  établissements  qui  ne  pouvaient  soutenir  la  lutte  pour  l'existence. 

Son  fils  Pierre  lui  succédait  et  lorsque  le  père  mourut,  la  mère  fut  associée 
aux  affairées. 

Encore  bien  jeune  Pierre  mourut,  et  sa  mère,  aidée  de  ses  deux  filles 
tâclmit  de  continuer  les  affaires;  mais  probablement  elle  n' avait  pas  assez  de 
force  et ,  lorsque  Lamesle  achetait  la  fonderie  entière,  c'était  pour  elle  un 
bon  débarras. 

Cinq  ans  après,  en  iy42  Lamesle  publia  une  épreuve  complète,  par  la- 
quelle cependant  nous  ne  saurons  découvrir,  quel  matériel  descendait  de 
Lamesle  ou  de  Cot ,  ce  qui  est  peu  important,  puisque,  comme  nous  l'avons 
déjà  dit,  presque  tout  le  matériel  s'est  perdu. 

Seulement  les  deux  assortiments  grecs  nous  sont  restés,  un  petit  texte  et  un 
cicéro  et  en  jugeant  d'après  la  gravure,  nous  les  comptons  parmi  les  types  du 
dix-septième  siècle  et  par  conséquent  sortant  de  la  fonderie  de  Jean  Cot. 

Gando ,  ayant  acheté  la  fonderie  de  Lamesle  en  ^y58,  Lajnesle  est  parti 
pour  Avignon  et  dès  lors  on  l'a  perdu  de  vue. 

Après  avoir  constaté  que  Pierre  François  Gando  était  un  graveur  renowr- 
mé,  nous  savons  la  même  chose  de  son  fils  Nicolas  Pierre.  Ambroise  Firmin 
Didot  nous  raconte  dans  son  article  bien  connu  sur  la  Typographie  dans 
l'Encyclopédie  qu'en  iySg  la  fonderie  de  Gando  „était  en  grande  activité" ; 
de  sorte  que  nous  pouvons  bien  supposer  que  dans  ces  jours  on  s'y  occupait  de  la 
gravure  de  types  selon  le  dernier  goût. 

Bien  que  ces  types  en  grande  partie  soient  gravés  par  le  propriétaire  de  la 
fonderie, nous  pouvons  constater  que  d'autres  artistes  renommés  l'ont  assisté. 

Nous  savons  qu'il  avait  comme  assistant  A.  Ressemer ,  un  Hollandais, 


qui  d'abord  s'était  établi  comme  graveur  pour  son  propre  compte  à  Paris,  et 
qui  plus  tard  fut  attacJié  à  la  fonderie  de  Gando. 

Dans  le  ^second  recueiV  de  nos  ,,épreuves''  nous  publions  quelques  lettres 
de  Bessemer  et  de  Gando  adressées  à  nos  ancêtres,  nous  donnant  une  idée 
de  l'activité  de  l'un  et  de  l'autre. 

Les  nouveaux  assortiments  étant  prêts ,  Gando  fit  paraître  un  spécimen , 
dont  nous  possédons  un  exemplaire,  lequel  exemplaire  nous  avons  réimprimé 
sous  le  titre  de  „premier  recueil". 

Les  deux  assortiments  grecs,  cités  plus  haut ,  y  sont  ajoutés.  D'un  double 
canon  romain  et  italique  et  d'un  parangon  ronde  manquent  les  matrices, 
étant  déjà  perdues  du  temps  de  l'achat  par  Jean  Enschedé  et  fils  en  /  83-j . 

Un  petit  romain  italique,  un  grand  romain  italique  et  quelques  Vignettes 
sont  encore  ajoutés  par  nous  à  ce  recueil,  puis  que  nos  archives  nous  apprennent 
qu'au  commencement  du  ig^^  siècle  ces  types  appartenaient  à  la  fonderie 
de  Gando. 

Après  que  cette  „épreuve"  eut  été  imprimée,  probablement  en  iSio ,  l'inven- 
taire de  matrices  fut  bien  agrandi,  mais  pour  autant  que  nous  savons ,  un 
nouveau  spécimen  n'a  jamais  été  publié. 

Nous  avons  inséré  ces  assortiments  dans  notre  spécimen  sous  le  titre  de 
„second  recueil"  et  nous  y  avons  ajouté  quelques  Vignettes  en  vente  dans 
cette  fonderie,  comme  nous  lisons  dans  une  lettre  de  Gando  à  notre  maison. 

Comme  „premier  recueil"  de  la  fonderie  bruxelloise  on  trouve  tout  ce  que 
Tliéodore  Simon  plus  tard  avait  acquis,  les  poinçons  ayant  peut-être  été 
gravés  par  lui-même,  mais  ayant  recours  aux  graveurs  belges  Istastoule 
et  Henri  Villeneuve  et  aussi  aux  graveurs  français  Veyrat  et  Dallut.  Le 
„recueil"  est  complété  avec  quelques  assortiments,  que  ces  graveurs  nous  ont 
fournis  directement.  A  la  fin  se  trouve  un  „second  recueil"  d'assortiments , 
fournis  par  Lombardat  et  d'autres  qu'on  ne  trouve  pas  dans  les  épreuves 
de  ce  dernier  Gando. 

Nous  n'avons  pas  à  critiquer  la  valeur  artistique  du  matériel  de  cette  fon- 
derie, mais  nous  supposons  d'avoir  fait  un  travail  utile  par  la  composition 
de  cette  „épreuve" ,  parce  qu'elle  nous  permet  de  nous  faire  une  idée  de  l'inven- 
taire d'une  des  fonderies  les  plus  considérables  de  la  France  pendant  une 
période  d'un  demi-siècle. 


EPREUVES 

DES    CARACTÈRES 

DE    LA    FONDERIE 

DE   N.  P.    GANDO, 

GRAVEUR  ET  FONDEUR. 


PREMIER     RECUEIL. 


A     PARIS, 
Rue  des  Maçons,  N".   21 


ROMAINS  ET  ITALIQUES. 


NOMPAREILLE. 

Une  femme  fort  pauvre,  mais  qui  avoit  la  consolation  d'avoir  une  fille  aimable,  et 
dont  les  grâces  modestes  annonçoient  la  sagesse,  se  présenta  avec  cette  jeune  personne 
à  l'audience  du  célèbre  cardinal  Famèse.  Elle  lui  exposa  qu'elle  étoit  sur  le  point 
d'être  renvoyée,  avec  sa  fille,  d'un  petit  appartement  qu'elles  occupoient  chez  un 
homme  fort  riche,  parce  qu'elles  ne  pouvaient  lui  payer  cinq  sequins  qui  lui  étoient 
dus.  Le  ton  d'honnêteté  avec  lequel  elle  faisoit  connoftre  son  malheur,  fit  aisément 
comprendre  au  cardinal  qu'elle  n'y  etoit  tombée,  que  parce  que  la  vertu  lui  étoit  plus 
chère  que  les  richesses.  Il  écrivit  un  mandat  et  la  chargea  de  le  porter  à  son  intendant. 
Celui-ci,  après  l'avoir  ouvert,  compta  sur-le-champ  cinquante  sequins.  Monsieur, 
lui  dit  cette  femme,  je  ne  demandois  pas  tant  à  monseigneur,  et  certainement  il  s'est 
trompé.  Il  fallut,  pour  làire  cesser  la  contestation,  que  l'intendant  allât  lui-même 
parler  au  cardinal.  Son  éminence,  en  reprenant  son  mandat,  dit  aux  deux  personnes 
qui  étoient  présentes  :  "Vous  avez  tous  i-aisons,  je  m'étois  trompé,  le  procédé  de  ma- 
dame le  prouve ,  et  au  lieu  de  cinquante  sequins  il  en  écrivit  cinq  cents ,  qu'il  engagea 
la  vertueuse  mère  d'accepter  pour  marier  sa  fille. 

NOMPAREILLE    ITALIQUE. 

Henri  de  Lorraine ,  duc  de  Guise,  surnommé  le  Balafré ,  avoit  gagné  au  jeu 
cent  mille  livres  à  M.  d'O,  surintendant  des  finances,  qui  le  lendemain  lui  en- 
voya soixante  et  dix  mille  livres  en  argent ,  et  dix  mille  écus  en  or  renfermés  dans 
un  sac  de  cuir.  Le  duc  croyant  que  ce  sac  ne  contenoit  que  de  l'argent  hlanc ,  le 
donna  par  gratification  au  commis  nommé  Lavienne  qui  lui  porta  la  somme.  Ce 
commis ,    qui   ignorait    lui-même   ce    que   ce   sac  pouvait  contenir ,    n'osa  le  refuser . 


MIGNONNE. 

On  a  e-xécuté ,  à  Prague ,  un  jeune  homme  pour  un  crime  d'une  nature  extraor- 
dinaire, on  ne  conçoit  même  pas  aisément  comment  il  a  été  commis.  Il  s'agit  d'un 
rapt  dont  on  ne  connoit  aucune  circonstance  que  d'après  la  confession  du  coupable. 
Or,  voici  ce  qu'il  a  déclaré.  Epris  d'une  passion  violente  pour  une  demoiselle  de 
cette  ville  extrêmement  bien  née,  aussi  vertueuse  que  belle,  il  a  long-temps  mé- 
dité les  moyens  de  la  satisfaire.  Il  portoit  en  conséquence,  sur  lui,  un  petit  flacon 
rempli  d'une  certaine  liqueur  qu'il  appelle  un  philtre,  dont  il  n'a  jamais  voulu 
révéler  la  composition,  et  dont  on  va  connoitre  l'effet.  Il  y  avoit  plusieurs  mois 
qu'il  guettoit  en  vain  l'occasion  d'en  faire  usage.  Enfin,  se  trouvant  un  jour  dans 
une  assemblée  avec  la  demoiselle,  elle  sentit  un  accès  de  migraine  dont  elle  se 
plaignit.  L'officieux  jeune  homme  lui  proposa  du  café  qui  fut  accepté,  et  avant  de 
le  présenter,  il  trouva  le  moyen  d'y  jeter  quelques  gouttes  de  sa  liqueur. 

MIGNONNE     I  T  A  LI  qUE. 

Granius,  Romain ,  pendant  la  guerre  civile  de  César  et  de  Pompée,  fut 
fait  prisonnier  par  Scipion ,  qui  lui  promit  la  vie,  s'il  voulait  quitter  le  parti 
de  César.  Les  soldats  de  César,  répondit  Granius,  donnent  la  vie  aux  au- 
tres, et  ne  la  reçoivent  de  personne;  et  aussitôt  il  s'enfonça  un  poignard 
dans  le  sein.  La  véritable  politesse  consiste  à  marquer  de  la  bienveillance 
aux  hommes. 


PETIT    TEXTE. 


N".    I. 


On  a  loué  l'adresse  avec  laquelle  le  jeune  Papirius  sut  dérober  son 
secret  aux  pressantes  sollicitations  d'une  mère  qui  le  chérissoit.  Son 
père,  sénateur  de  Rome ,  l'avoit  un  jour  mené  au  sénat,  où  l'on  déli- 
béroit  des  affaires  les  plus  importantes.  A  son  retour ,  sa  mère  lui  de- 
manda ce  qui  s'étoit  passé  au  sénat.  Le  jeune  Papirius  lui  répondit 
qu'il  avoit  été  défendu  d'en  parler.  Cette  réponse ,  comme  on  le  pense 
bien,  ne  fit  qu'augmenter  la  curiosité  de  cette  femme:  elle  employa 
les  moyens  les  plus  pressans  pour  obtenir  ce  qu'elle  desiroit.  Son  fils , 
vivement  pressé ,  crut  devoir  la  satisfaire  par  un  mensonge  adroit.  Il 
lui  dit  qu'on  avoit  délibéré  s'il  seroit  plus  utile  à  la  république  de  don- 
ner deux  femmes  à  un  mari ,  que  d'accorder  deux  maris  à  \xne  femme. 
L'épouse  du  sénateur,  inquiète  sur  cette  prétendue  délibération,  cou- 
rut aussitôt  communiquer  ses  craintes  aux  autres  dames  romaines.  Le 
lendemain  elles  se  présentèrent  à  la  porte  du  sénat ,  dirent  tout  liant 
qu'il  falloit  plutôt  donner  deux  maris  à  une  femme,  et  qu'on  ne  devoit 
rien  conclure  sans  les  entendre.  Les  sénateurs  ne  comprenant  rien 
aux  demandes  de  ces  femmes  attrovipées ,  le  jeune  Papirius  les  tira  de 
peine ,  en  leur  racontant  de  quelle  manière  il  avoit  fallu  éluder  la  cu- 
riosité de  sa  mère.  On  loua  sa  prudence  ;  mais  il  fut  résolu  qu'à  l'avenir 
aucun  jeune  homme  n'auroit  l'entrée  du  sénat ,  excepté  le  jeune  Papi- 
rius. C'est  un  dépôt  bien  dangereux  pour  un  sujet ,  que  le  secret  de  son 
maître.  Aussi  le  poète  Pliilipide ,  favori  de  Lysimacus ,  un  des  succes- 
seurs d' Alexandre-le-Grand ,  interrogé  par  son  prince  sur  ce  qu'il  desi- 
roit le  plus  :  Tout  ce  qu'il  vous  plaira ,  seigneur ,  lui  dit-il ,  à  la  réserve 
de  votre  secret. 


PETIT    TEXTE    ITALIQUE. 

Un  homme  de  finances  jouoit  mille  pistoles  aupiquet,  en  une  partie, 
avec  un  seigneur  de  la  cour.  Celui-ci  jugea  qu'ilpoupoit  le  faire  capot 
et  le  gagner,  s'il  lui persuadoit  qu'il  avoit  trois  valets,  dont  cependant 
il  en  avoit  écarté  un.  Il  compte  le  point  et  le  reste  de  son  jeu  jusqu'à 
vingt  ;  et,  après  avoir  rêvé  un  moment,  il  jette  sa  première  carte,  et 
compte  vingt-trois. Son  adversaire  lui  demande, comment  il  les  compte. 
Le  courtisan  recommence  à  compter  son  jeu,  et  ajoute  trois  valets.  Le 
renard  sait  beaucoup;  muis  une  femme  amoureuse  en  sait  davantage. 
La  santé  du  corps  est  le  pavot  de  l'ame. 


225. 


PETIT    TEXTE. 

N°.    IL 

Sëyille,  la  capitale  de  l'Andalousie,  et  une  des  principales  villes  de 
l'Espagne,  s'est  autrefois  signalée  par  les  intrigues  amoureuses  de  deux 
personnes  qui  font  le  sujet  de  cette  histoire.  Rodrigue  étoit  le  nom  de 
l'amant,  et  Isabelle  celui  de  l'amante.  Rodrigue  étoit  un  jeune  gentil- 
homme qui  servoit,  en  qualité  de  page ,  un  des  premiers  Marquis  de  la 
ville;  et  Isabelle  étoit  une  demoiselle  de  quinze  ans,  parente  de  la 
Marquise ,  qui  l'avoit  prise  par  amitié  auprès  d'elle.  Rodrigue ,  qui  en 
devint  éperduement  amoureux,  prit  son  temps  pour  lui  faire  sa  décla- 
ration d'amour.  Isabelle  l'écouta,  et  lui  fit  même  une  réponse  favorable  : 
ils  s'aimèrent  tant,  qu'ils  n'étoient  plus  qu'un  cœur  et  qu'une  ame. 
Leur  amour  fut  su  de  toute  la  maison ,  et  on  n'y  parloit  d'autre  chose 
que  des  amours  de  Rodrigue  et  d'Isabelle.  Isabelle  en  fut  avertie  par 
une  demoiselle  de  ses  amies,  qui  lui  dit  que  la  chose  étoit  venue  aux 
oreilles  du  Marquis  et  de  la  Marquise.  Cette  nouvelle  affligea  beaucoup 
Isabelle ,  qui  la  pria  de  lui  donner  quelque  bon  conseil.  Ce  n'est  pas  un 
crime,  lui  dit  la  demoiselle,  d'avoir  quelque  intrigue  amoureuse  avec 
un  gentilhomme,  cela  n'est  que  fort  ordinaire,  et  pourvu  que  l'on  ait 
soin  de  conserver  son  honneur,  une  demoiselle  en  est  bien  plus  esti- 
mée :  ainsi ,  je  ne  vois  pas  que  vous  ayiez  aucun  sujet  de  vous  affliger,  à 
moins  que  ce  ne  soit  de  l'avis  que  je  m'en  vais  vous  donner.  C'est  que, 
pour  fermer  la  bouche  à  tout  le  monde ,  il  faut  qvie  votre  amant ,  sans 
faire  semblant  qu'il  se  doute  de  rien ,  demande  son  congé  à  monsieur 
le  Marquis  et  à  madame  la  Marquise,  sous  prétexte  de  faire  un  voyage. 
Il  est  en  âge,  poursuivit-elle ,  de  souffi-ir  la  fatigue  ;  qu'il  s'en  aille  pour 
quelque  temps  à  Madrid. 

PETIT   TEXTE  ITALIQUE. 

Un  militaire ,  qui  depuis  plus  de  dix  ans  avoit  quitté  le  lieu  de  sa 
naissance ,  y  revint  pour  voir  sa  famille.  Les  choses  étant  changées 
pendant  son  absence,  il  ne  put  trouver  la  nouvelle  demeure  de  son  père. 
La  première  maison  ou  il  entra  fut  celle  de  sa  marraine ,  qui  ne  le  re- 
connut qu'après  une  longue  conversation  y  ce  qui  lui  donrui  l'idée  de  ne 
point  se  faire  connoitre  de  sa  famille.  Après  qu'on  lui  eut  indiqué  la 
nouvelle  demeure  de  ses  parens ,  il  s'y  rend,  demande  à  coucher ,  et 
remet  à  son  hôte  vingt  louis,  en  le  priant  de  lui  garder  cet  te  somme  jus- 
qu'au lendemain. 


^''\  i-4.   i438. 


PETIT    TEXTE. 


N°.     III. 


A  Valladolid ,  ville  célèbre  de  la  Castille  vieille ,  en  Espagne ,  il  y  avoit 
autrefois  une  fameuse  courtisane  qui  s'appeloit  Laure.  Elle  étoit  d'une 
humeur  enjouée ,  et  tout-à-fait  agréable.  Après  avoir  amassé  quelque  bien 
parmi  les  nobles  de  la  ville,  elle  s'attacha  uniquement  à  un  jeune  cava- 
lier, nommé  Don  Fernandès.  Il  étoit  très-bien  fait,  et  brave ,  mais  abso- 
lument dénué  de  fortune.  Il  ne  laissa  pas  pourtant  de  s'adresser  à  Laure , 
sachant  qu'elle  avoit  l'ame  noble ,  et  qu'elle  étoit  d'humeur  à  préférer  un 
honnête  homme  sans  richesses ,  à  un  homme  riche  sans  esprit  ou  sans 
honneur.  Il  réussit  dans  son  entreprise ,  et  Laure  fut  si  charmée  de  sa 
personne ,  qu'elle  abandonna  tous  les  autres  amans.  Ils  vécurent  ensemble 
avec  assez  de  profusion ,  tant  que  le  bien  de  Laure  dura  ;  mais  enfin  la 
nécessité  lui  fit  ouvrir  les  yeux ,  et  reconnoître  son  erreur.  L' Alcadil- 
Major  de  la  ville  (c'est  le  juge  suprême  sous  l'autorité  du  roi)  étoit  amou- 
reux de  Laure.  Il  lui  envoyoit  des  présens ,  et  la  sollicitoit  par  toutes  sortes 
de  voies  de  se  rendre  à  la  passion  qu'il  avoit  pour  elle.  Laure  lui  faisoit 
entendre  qu'elle  ne  pou  voit  s'y  résoudre  à  cause  de  Don  Fernandès ,  qu'elle 
craignoit  extrêmement  ;  mais  que  si  Don  Fernandès  alloit  faire  quelque 
voyage ,  elle  se  donneroit  toute  entière  à  lui.  Elle  amusa  de  cette  manière , 
pendant  quelque  temps,  ce  juge  dont  elle  recevoit  de  nouveaux  présens. 
Enfin  les  affaires  de  Fernandès  l'appelèrent  à  Madrid ,  où  il  devoit  rester 
deux  ou  trois  mois.  Avant  que  de  partir,  il  pria  Laure  de  lui  ètrefidelle, 
et  menaça  de  la  maltraiter,  s'il  apprenoit,  à  son  retour,  qu'elle  se  fût 
émancipée.  Laure  lui  fit  espérer  que  sa  conduite  ne  lui  donneroit  jamais 
sujet  de  se  plaindre  d'elle.  Sur  cette  assurance  il  partit.  Après  son  départ, 
Laure  se  vit  d'abord  courtisée  par  plusieurs  galans. 

PETIT    TEXTE    ITALIQUE. 

Le  célèbre  abbé  Prévost  soupoit  un  jour  avec  quelques  amis  intimes, 
pareillement  hommes  de  lettres.  Après  qu'on  eut  épuisé  lapolitique,  la 
littérature ,  l'histoire  du  jour ,  la  conversation  tomba  insensiblement 
sur  la  morale.  Un  des  convives  avança  que  le  plus  honnête  homme  ne 
pouvoit  répondre  de  ne  jamais  subir  les  supplices  réservés  aux  crimi- 
nels :  ajoutez,  dit  l'abbé  Prévost,  ni  même  de  les  mériter.  Chacun  se 
récria  sur  cette  dernière  assertion.  Oui,  messieurs,  reprit  l'abbe,je 
vous  soutiens  qu'on  peut  très-bien  avec  unbon  cœur,  une  ame  droite, 
avoir  le  malheur  de  commettre  un  crime  qui  conduise  à  l'échafaud. 


N"^.     1.10.     221. 


p.  TEXTE   G.   OEIL. 

L'usure  a  été  proscrite  dans  presque  tous  les  gouvememens , 
ou  du  moins  parmi  les  nations  sagement  administre'es ,  par 
rapport  aux  inconveniens  qu'elle  entraîne  et  qui  sont  ve'rita- 
blement  très -funestes.  Elle  diminue  le  nombre  des  marchands, 
elle  les  rend  tous  communément  pauvres ,  parce  qu'on  ne  peut 
commercer  avec  commodité  et  profit  si  on  empninte  à  de  gros 
intérêts.  Un  troisième  inconvénient,  qui  est  comme  attaché 
aux.  deux  premiers,  c'est  la  diminution  dans  le  produit  des 
douanes. 

Comme  les  diam,ans  ne  se  polissent  que  par  d'autres  dia- 
mans,  aussi  les  esprits  ne  peuuent  arriver  à  la  perfection  que 
par  la  fréquentation  d'autres  esprits  qui  les  épurent,  car  on 
ne  peut  voir  des  hommes  vertueux  et  sauans ,  sans  retirer  de 
grands  avantages  dans  leur  compagnie.     I  TA  L  I  Q  U  E. 

GAILLARDE. 

Un  homme  absolument  méchant,  s'il  en  existe  dans  la 
nature,  n'est  point  ému  par  le  spectacle  du  malheur  ou  du 
bien  être  de  l'humanité  :  tous  ces  sentimens  doivent  être 
renversés  et  entièrement  opposés  à  ceux  des  autres  hom- 
mes. L'intérêt  que  l'on  prend  au  bonheur  de  ses  semblables 
est  accompagné  d'un  sentiment  très  délicat  des  distinctions 
morales,  d'un  éloignement  pour  l'injustice  et  d'une  appro- 
bation prompte  des  actions  équitables.  Tout  ce  qui  peut 
contribuer  au  bonheur  de  l'humanité,  excite  dans  l'ame  de 
l'homme  méchant  un  mécontentement  qui  lui  fait  considé- 
rer complaisamment  la  cause  des  malheurs  de  la  société. 

On  n'a  peut-être  pas  encore  rencontré  un  homme  parfai- 
tement méchant,  ou  qui  le  fut  gratuitement  et  sans  motif: 
un  homme  qui  se  promène  avec  une  personne  qui  a  la 
goutte,  ne  lui  marchera  exprès  sur  le  pied  douloureux. 

Peu  de  personnes  font  attention  à  une  vertu  ahassiée 
sous  le  poids  de  l'humiliation  et  de  la  pauvreté .  Si  par  ha- 
zard  elle  perce  les  ténèbres  qui  l'environnent,  on  se  contente 
d'une  froide  louange ,  et  on  lui  donne  rarement  des  mar- 
ques sensibles  de  son  estime.  ITALIQUE. 


N°s.  222.  223.  280.   i434. 


PETIT     ROMAIN. 

N".  I. 

Les  Grecs,  tout  Grecs  qu'ils  sont,  ont  quelquefois  été  pris 
pour  dupes.  Trois  de  ces  messieurs  logeoient  dans  une  même 
auberge  avec  un  j  eune  Provincial  venu  à  Paris  pour  recueillir 
une  riclie  succession.  Ils  résolurent  de  clianger  les  intentions 
du  testateur,  en  s'appropriant  une  partie  de  cet  héritage.  Un 
soir  ils  proposèrent  à  cet  efiPet,  au  Provincial,  de  jouer.  Ce- 
lui-ci, qui  avoit  des  affaires  pressantes  pour  le  moment,  de- 
manda que  la  partie  fut  remise  au  lendemain,  ce  qui  fut  ac- 
cepté de  bon  cœLU-  de  la  part  des  Grecs.  Ils  s'assemblèrent 
même  une  heure  avant  le  temps  marqué  pour  le  rendez- vous 
dans  la  chambre  ou  étoit  dressée  la  table  du  jeu,  et  déhbé- 
rèrent  de  quelle  manière  ils  gagneroient  le  Provincial.  Il  fut 
décidé  qu'on  joueroit  au  lansquenet,  et  que,  pour  écarter 
tout  soupçon,  on  lui  laisserait  gagner,  au  commencement, 
cent  louis  ;  ils  avoient  d'ailleurs  éprouvé  que  les  dupes  se 
livi'ent  toujours  au  jeu  avec  plus  d'ardeur  par  cet  appât. 
Le  projet  étoit  bien  concerté,  et  ne  pou  voit  manquer  de  réus- 
sir, si  le  Provincial,  qui  étoit  rentré  dans  l'auberge  sans  qu'on 
le  soupsonnat,  n'eut  entendu  cette  conversation  d'une  cham- 
bre voisine. 

PETIT    ROMAIN    ITALIQUE. 

Un  jeune  ecclésiastique ,  auquel  on  pouvait  reproclier 
une  prononciation  affectée ,  et  des  gestes  maniérés  ^  prê- 
chait dans  une  ville  de  province.  S'étant  ti^ouvé  le  lende- 
main chez  le  président  de  la  juridiction ,  il  se  plaignit 
de  ce  que  les  officiers  de  cette  juridiction  avoient  quitté 
son  sermon  pour  aller  à  la  comédie.  Ces  gens ,  répondit 
le  président ,  sont  de  bien  mauvais  goût ,  de  vous  quitter 
pour  des  comédiens  de  campagne. 


282.  i4()5. 


PETIT    ROMAIN    ITALIQUE. 

Je  me  souviens  de  cet  instant  plein  de  Joie  et  de  trouble  où 
Je  sentis,  pour  la  première  fois,  ma  singulière  existence: Je  ne 
savois  ce  que  J'étois,  ou  J'étois,  d'où  Je  venais.  J'ouvris  les 
yeux:  quel  surcroît  de  sensation!  la  lumière,  la  voûte  céleste, 
la  verdure  de  la  terre,  le  cristal  des  eaux,  tout  m'occupoit , 
m'animoit,  et  me  donnait  un  sentiment  inexprimable  déplaisir. 
Je  crus  d'abord  que  tous  ces  objets  étaient  en  mai,  et  faisaient 
partie  de  moi-même.  Je  m'affermissais  dans  cette  pensée  nais- 
sante, lorsque  Je  tournai  les  yeux  vers  l'astre  de  la  lumière , 
son  éclat  me  blessa  ;  Je  fermai  involontairement  la  paupière , 
et  Je  sentis  une  légère  douleur.  Dans  ce  moment  d'obscurité. 
Je  crus  avoir  perdu  tout  mon  être. 

Affligé,  saisi  d'étonnement ,  Je  pensais  à  ce  grand  cJiange- 
ment ,  quand  tout  à  coup  J'entends  des  sans:  le  citant  des 
oiseaux,  le  murmure  des  airs,  formaient  un  concert  dont  la 
douce  impression  me  remuait  Jusqu'au  fond  de  l' âme  ;  J' écou- 
tai longtemps ,  et  Je  me  persuadai  bientôt  que  cette  liarmonie 
était  moi. 

Attentif,  occupé  tout  entier  de  ce  nouveau  genre  d'exis- 
tence. J'oubliais  déjà  la  lumière ,  cette  autre  partie  de  mon 
être  que  J'avais  connue  la  première ,  lorsque  Je  rouvris  les 
yeux.  Quelle  Joie  de  me  retrouver  en  possession  de  tant  d'ob- 
jets brillants  !  Mon  plaisir  surpassa  tout  ce  que  J'avois  senti 
la  première  fois ,  et  suspendit  pour  un  temps  le  cliarmant 
effet  des  sons. 

Je  fixai  mes  regards  sur  mille  objets  divers  ;  Je  m'aperçus 
bientôt  que  Je  pouvais  perdre  et  retrouver  ces  objets,  et  que 
J'avois  la  puissance  de  détruire  et  de  reproduire  à  mon  gré 
cette  belle  partie  de  mai-même  ;  et,  quoiqu'elle  me  parût  im- 
mense en  grandeur,  et  par  la  quantité  des  accidents  de  lu- 
mière, et  par  la  variété  des  couleurs ,  Je  crus  reconnaître  que 
tout  était  contenu  dans  une  portion  de  mon  être. 


N".  a83.     Cet  assortiment  ne  se  trouve  pas  dans  le  spéciujcn   de  Gando. 


PETIT    ROMAIN. 

N°.    II. 

Le  projet  e'tait  bien  concerte',  et  ne  pouvoit  manquer  de 
re'iissir,  si  le  Provincial,  qui  e'tait  rentre'  dans  l'auberge  sans 
qu'on  le  soupçonnât,  n'eut  entendu  cette  conversation  d'une 
chambre  voisine.  Il  dressa,  en  conse'quence ,  sa  contre- 
partie. Une  demi-lieure  après,  il  se  rendit  dans  la  salle, 
se  mit  au  jeu;  et  lorsqu'il  eut  gagné  les  cent  louis,  son  la- 
quais ,  qui  était  averti ,  vint  lui  dire ,  dans  le  moment ,  qu'une 
personne  vouloit  lui  parler.  Il  sortit,  et  alla  loger  ailleurs. 
Les  Grecs  n'en  ont  pas  été  quittes  à  si  bon  marché.  Un 
d'eux  jouoit  au  piquet  avec  un  vieux  capitaine  de  cavale- 
rie, dans  une  ville  de  province,  et  le  fdoutoit  sans  user  de 
beaucoup  d'adresse.  Toutes  les  fois  qu'il  vouloit  avoir  beau 
jeu ,  il  mouchoit  d'une  main  la  chandelle ,  et  de  l'autre  es- 
camotoit  le  talon.  L'ancien  militaire ,  n'étoit  pas  dupe ,  s'é- 
tant  aperçu  deux  ou  trois  fois  de  cette  manœuvre,  lui  dit, 
en  s'arretant  et  posant  ses  cartes  sur  la  table:  Monsieur,  je 
remarque  que  toutes  les  fois  que  vous  mouchez  la  chandelle, 
je  n'ai  point  d'as.  Je  vous  serois  obligé  de  vouloir  bien  vous 
dispenser  de  prendre  tant  de  peine;  car  j'aime  encore  mieux 
n'y  voir  pas  si  clair,  et  avoir  des  yeux  moins  louches. 

PETIT    ROMAIN    ITALIQUE. 

Beautru ,  étant  en  Espagne,  alla  visiter  la  fameuse 
bibliothèque  de  l'Escurial,  où  il  trouva  un  bibliothécaire 
fort  ignorant.  Le  roi  d'Espagne  l'interrogea  sur  cette 
bibliothèque.  Elle  est  très -belle ,  dit-il,  ?nais  votive  majesté 
deproit  donner  à  celui  qui  en  a  le  soin  Vadministi^ation 
de  ses  finances.  Et  pourquoi ,  dit  le  prince?  C'est,  reprit 
Beautru ,  que  cet  homme  ne  touche  point  au  dépôt  qui  lui 
est  confié. 


No\  .98.  299. 


PETIT     ROMAIN. 
N°.     I  I  I. 

Un  homme  étoit  monté  au  plus  haut  du  clocher  d'une 
église  pour  y  raccommoder  quelque  chose.  Il  eut  le  mal- 
heur de  tomber  en  bas  ;  mais  en  même- temps  il  fut  assez 
heureux  pour  ne  se  faire  aucun  mal ,  et  sa  chute  ne  devint 
funeste  qu'à  un  homme  qu'il  écrasa  en  tombant.  Les  parens 
de  cet  homme  attaquèrent  en  justice  celui  qui  étoit  tombé 
du  clocher,  l'accusant  de  meurtre,  et  prétendant  le  faire 
condamner,  sinon  à  la  mort,  du  moins  à  de  forts  dommages 
et  intérêts.  L'affaire  fut  plaidée.  Il  falloit  accorder  quelque 
satisfaction  aux  parens  du  mort.  D'un  autre  coté,  les  juges 
ne  pouvoient  punir  un  crime  dont  un  accident  malheu- 
reux étoit  la  seule  cause.  Il  fut  ordonné  à  celui  qui  deman- 
doit  vengeance,  de  monter  au  haut  du  clocher,  et  de  se 
laisser  tomber  sur  celui  qu'il  poursuivoit ,  lequel  é  toi  t  obligé 
de  se  trouver  précisément  au-dessous  de  la  même  place  ou 
le  défunt  avoi  t  perdu  la  vie.  Un  j  ugement  pareil  fut  la  fin  du 
procès.  Un  marchand  Turc  avoit  perdu  sa  bourse  qui  conte- 
noit  deux  cents  pièces  d'or.  Il  s'adressa  au  crieur  public,  à  qui 
il  ordonna  de  déclarer  qu'il  donneroit  la  moi  tiède  la  somme 
à  celui  qui  l'auroit  trouvée. 

PETIT    ROMAIN    ITALIQUE, 

Un  paysan  étoit  allé  trouver  un  avocat  pour  le  consulter 
sur  une  affaire.  Il  avoit  son  argent  à  la  main ,  et  paroissoit 
désirer  que  la  consultation  favorisât  ses  prétentions.  L'a- 
vocat pensa,  avec  raison,  qu'il  n' étoit  pas  de  son  devoir 
d'user  de  cette  complaisance  ;  et  pour  l'intérêt  même  de 
celui  qui  le  consultoit ,  il  lui  dit  que  sa  cause  n' étoit  pas 
soutenahle. 


N"\  149G.   1497 


PETIT   ROMAIN  OEIL  DE  PHILOSOPHIE. 

N°.     IV. 

Pendant  tout  le  carnaval,  il  se  fit  dans  cette  maison  plu- 
sieurs petites  parties  de  divertissement,  ou  n'ëtoient  admis 
que  les  jeimes  cavaliers  et  les  demoiselles  de  la  famiUe,  qui 
e'toient  les  personnes  les  plus  distinguées  de  toute  la  ville. 
Celui  qui  brrlloit  le  plus  parmi  les  jeunes  gens  qui  y  ve- 
noient  passer  presque  toutes  les  soirées,  e'toit  Aldobrandin, 
ne'  d'une  des  plus  illustres  maisons  de  toute  ITtalie.  Il  avoit, 
outre  les  agi^e'mens  du  corps,  ime  vivacité'  d'esprit  et  un 
enjouement  dans  Fhumeur  qui  le  rendoient  les  délices  de 
la  socie'te'.  Il  soutenoit  d'ordinaire  qu'il  y  avoit  infiniment 
plus  de  plaisir  a  cajoler  les  suivantes,  qu'a  faire  la  cour  a 
leurs  maitresses.  Il  appuyoit  cette  opinion  par  mille  raisons 
boufonnes  qui  ne  laissoient  pas  d'avoir  quelque  espèce  de 
solidité',  et  il  confinnoit,  par  sa  conduite,  ce  qu'il  prouvoit 
par  ses  argumens  badins.  Sa  tendresse  pour  ces  sortes  de 
personnes  n'étoit  d'ordinaire  qu'im  badinage,  mais  a  peine 
eut-il  vu  Octavie,  qu'il  l'aima  se'rieusement.  Il  fit  des  excla- 
mations sur  sa  beauté'  qui  firent  rire  la  compagnie,  et  qui 
arrachèrent  a  Octavie  de  petits  sourires  pleins  de  finesse 
qui  augmentoient  ses  charmes,  et  qui  donnoient  bonne  opi- 
nion de  son  esprit.  Un  soir  que  la  dame  du  logis  donnoit  a 
ses  parens  im  souper  suivi  d'un  petit  bal ,  Aldobrandin  prit 
Octavie  pom-  danser  le  plus  souvent  qu'il  lui  fiit  possible , 
et  distrait  et  silencieux  pour  tout  autre,  il  ne  chercha  que 
l'occasion  de  parler  a  cette  pre'tendue  suivante:  il  lui  dit 
mille  douceurs,  qu'elle  reçut  toutes  comme  des  eÔets  de 
son  hiuneur  enjouée,  et  ou  elle  ne  répondit  qu'en  badinant: 
il  en  e'toit  enrage,  et  il  souhaitoit  de  n'avoir  badine  de  sa 
vie,  pour  pouvoir  persuader  qu'il  parloit  alors  se'rieusement; 
mais  il  eut  beau  faire,  il  ne  put  re'ussir  a  faire  changer 
Octavie  de  ton. 


NO.  366. 


CICERO    ROMAIN. 

r.   I. 

Spartacus,  esclave,  jeté  parmi  ces  infortunés  des- 
tinés à  périr  pour  amuser  ces  féroces  Romains,  qui 
faisoient  servir  les  hommes  à  leur  barbare  plaisir, 
conçut  le  dessein  d'affranchir  toute  l'Italie;  il  brisa 
ses  fers  et  ceux  de  ses  compagnons  d'esclavage.  Avant 
notre  ère,  il  se  retira  sur  le  mont  Cervisius;  là,  il 
voulut  d'abord  renvoyer  ses  soldats  dans  leur  patrie, 
en  disant  que  c'étoit  assez  pour  lui  d'avoir  rendu  la 
liberté  à  tant  de  misérables.  Mais  tous  pleuroient  des 
frères  et  des  amis:  ils  restèrent,  et  Spartacus,  plein 
tout-à-coup  de  l'idée  de  venger  l'univers  opprimé 
par  les  Romains,  résolut  de  se  servir  de  leurs  bras 
pour  écraser  les  tyrans  du  monde,  ou  de  mourir  libre. 
Trois  fois  il  battit  complètement  les  Romains  ;  mais 
enfin  il  tomba  percé  de  mille  coups  sur  un  monceau 
d'ennemis  immolés  à  sa  vengeance. 

CICÉRO    ITALIQUE. 

Considérez  les  dlfférens  états  de  la  vie  où  la 
naissance  et  Véducation  peuvent  vous  destiner, 
et  consultez  votre  génie  aidant  d^en  embrasser 
aucun.  Ce  qui  perd  un  homme,  et  pour  sa  for- 
tune et  pour  sa  réputation,  c'est  de  se  Jeter  dans 
une  profession  qui  ne  lui  convient  pas. 


N"s.  4o2. 


igS. 


CICERO    ROMAIN.   ' 

N°.    IL 

Vers  la  fin  du  quinzième  siècle,  il  y  ayoit  en  Sicile 
un  fameux  plongeur  qui  s'appeloit  Nicolas.  On  lui 
avoit  donné  le  surnom  de  Pescecola,  comme  qui  di- 
roit  Nicolas  le  Poisson.  Il  s'étoit  accoutumé  dès  sa 
plus  tendre  jeunesse  à  pêcher  des  huîtres  et  du  corail 
au  fond  de  la  mer,  et  demeuroit  quelquefois  quatre 
ou  cinq  jours  dans  l'eau,  n'y  vivant  que  de  poisson 
cru.  Comme  il  nageoit  parfaitement,  il  lui  arrivoit 
souvent  de  passer  à  File  de  Liparo ,  et  d'y  porter  des 
lettres  enfermées  dans  un  sac  de  cuir.  Frédéric,  roi 
de  Sicile ,  instruit  de  la  force  et  de  l'adresse  de  Pes- 
cecola,  lui  ordonna  de  plonger  dans  le  gouffre  de 
Caribde,  proche  du  promontoire  il  Capo  di  Paro, 
pour  reconnoître  la  disposition  de  ce  lieu.  Comme 
le  prince  remarqua  que  Nicolas  avoit  de  la  peine  à 
faire  un  essai  si  dangereux. 

CICÉRO    ITALIQUE. 

Un  père  açoit  ses  raisons  pour  ne  pas  exagérer 
devant  sa  fille  le  bonheur  du  mariage.  Celle  qui 
prend  mari,  lui  disoit-il y  fait  hien^  mais  fait 
mieux  celle  qui  n'en  prend  pas.  Mon  père^  ré- 
pondit la  doucette ,  faisons  bien ^  fera  mieux  qui 
pourra. 


N°'.  4o4.  4o5.     Gravé  par  A.  Bessemer. 


CICERO    ROMAIN. 

N°.    III. 

Le  duc  de  Roquelaure  n'ëtoit  pas  beau.  Un  jour 
ce  seigneur  rencontrant  un  Auvergnat  fort  laid ,  qui 
avoit  des  affaires  à  Versailles  ;  il  le  présenta  lui- 
même  à  Louis  XIV,  en  lui  disant  qu'il  avoit  les 
plus  grandes  obligations  à  ce  gentilhomme.  Le  roi 
voulut  bien  accorder  la  grâce  qui  lui  étoit  demande'e , 
et  s'informa  du  duc  quelles  étoient  les  oljligations 
qu'il  devoit  à  cet  homme.  Ah!  sire,  répartit  M.  de 
Roquelaure,  sans  ce  magot-là,  je  serois  l'homme  le 
plus  laid  de  votre  royaume.  Le  roi  sourit  à  cette 
saillie;  et  l'Auvergnat,  en  homme  d'esprit,  ne  fit 
pas  semblant  d^y  prêter  attention ,  et  ne  parut  occupé 
que  de  sa  reconnoissance.  Racine  aimoit  la  Chan- 
meslé.  Le  comte  de  Tonnerre  le  supplanta  dans  le 
cœur  de  cette  comédienne.  Quelqu'un  dit  à  ce  sujet: 
Que  le  tonnerre  l 'avoit  déracinée. 

CICERO    ITALIQUE, 

Une  très-belle  femme  qui  n' avoit  point  d^enfans, 
et  qui  ne  croyoit  pas  que  ce  fût  sa  faute,  ayant 
un  Jour  un  beau  diamant  au  doigt:  a  Koilà,  lui 
((  dit  son  mari  f  un  diamant  merveilleux ,  mais 
{(  fort  mal  mis  en  œuvre.  Il  n'est  pas  le  seul , 
((  repondit -elle  avec  un  sourire  malin.  » 


N"\  i4Go.   i4Gi 


C  I  C  É  R  O    ROMAIN. 

V.    lY. 

Le  caractère  sombre  et  impitoyable  des  Espa- 
gnols, Tainqueurs  des  Indiens  en  Amérique,  a  voit 
rendu  à  ces  derniers  le  nom  Espagnol  un  ol^jet 
d'exécration.  Le  cacique  Hatvey,  celui  des  insu- 
laiiTS  de  Tile  de  Cuba  qui  avoit  fait  les  plus  gi^ands 
efforts  pour  défendis  sa  liberté ,  ayant  été  vaincu 
et  pris ,  fut  condanmé  à  être  iDrùlé  vif.  Lorsque  ce 
prince  mallieiueux  fut  attaché  au  poteau  où  il  de- 
voit  expii^er,  lui  missioimaiiT  Texliorta  à  se  faii^e 
cluTtien,  et  l'assiu^a  que  son  changement  de  reh- 
gion  lui  prociuTra  le  paracUs.  Dans  le  paradis ,  dont 
vous  me  faites  une  si  belle  peint  lu^e,  y  a-t-il  des 
Espagnols ,  demande  le  cacique?  Oui ,  sans  doute , 
répond  le  rehgieux,  mais  il  n'y  en  a  que  de  bons. 
Le  meilleur  ne  vaut  rien,  réphqua  Hatvey  :  je  ne 
puis  me  résouch^  à  aller  dans  un  heu  où  j'aïuois  à 
craindiT  d'en  trouver  un  seul. 

CICÉRO    ITALIQUE. 

Le  père  Cotton ,  jésuite,  étoit  fin  et  rusé;  il 
avoit  pris  un  grand  ascendant  sur  Henri  IV , 
ce  qui  donna  lieu  à  cette  pointe.  Xotre  j^oi  est  un 
bon  prince ,  il  aime  la  vérité  ;  c'est  dommage 
qu'il  ait  du  coton  dans  les  oreilles. 


'%■ 


CICERO    ROMAIN. 

N°.    V. 

Deux  Arcadiens,  amis  intimes,  voyageant  en- 
semble, arrivèrent  à  Mégare,  et  allèrent  loger 
l'un  chez  son  hôte,  et  l'autre  dans  une  auberge. 
Le  premier  vit  en  songe  son  compagnon  qui  le 
conjuroit  de  venir  le  sauver  des  mains  de  son 
aubergiste,  qui  en  vouloit  à  sa  vie,  l'assurant 
qu'en  faisant  diligence,  il  pouvoit  encore  le 
tirer  du  péril.  L'ami,  éveillé  par  cette  vision, 
saute  du  lit,  et  prend  le  chemin  de  l'auberge  ; 
mais,  par  une  malheureuse  fatalité,  il  con- 
damne bientôt  lui-même  cette  résolution  si 
généreuse  comme  étant  inutile,  et  comptant 
pour  rien  ce  qu'il  avoit  vu,  il  regagne  son  lit, 
et  se  rendort.  Bientôt  il  revit  son  ami  couvert 
de  blessures,  lui  demander  en  grâce  que,  puis- 
qu'il avoit  négligé  de  lui  sauver  la  vie,  il  ne 
refusât  point  de  venger  sa  mort;  ajoutant  qu'au 
moment  même  ou  il  parloit,  l'aubergiste  qui 
l'avoit  massacré  faisoit  emporter  son  cadavre 
hors  de  la  ville  dans  un  tombereau  couvert  de 
fumier.  Pressé  par  son  ami,  d'une  manière  si 
précise,  il  court  vers  la  porte  de  la  ville,  arrête 
le  tombereau  qui  lui  étoit  désigné  par  le  songe, 
et  fit  punir  l'aubergiste  du  dernier  supplice. 


N".  i55G. 


SAINT-AUGUSTIN. 

N^   I. 

Une  pimbêche  d'importance  qui  avoit  un 
procès,  étoit  venue  solliciter,  en  sa  faveur,  un 
premier  président  de  cour  souveraine.  Comme 
ce  magistrat  ne  lui  avoit  pas  fait  l'accueil  qu'elle 
croyoit  lui  être  du,  elle  dit  en  passant  dans 
l'antichambre,  mais  assez  haut  pour  être  en- 
tendue du  président  :  Peste  soit  du  vieux  singe  ! 
Le  lendemain  néanmoins  l'affaire  fut  appelée, 
et  cette  dame  gagna  son  procès.  Elle  courut 
aussitôt  remercier  le  président,  qui,  pour  toute 
vengeance,  se  contenta  de  lui  dire:  Sachez, 
madame,  une  autre  fois,  qu'un  vieux  singe  est 
toujours  disposé  à  faire  plaisir  aux  guenons. 
On  connoit  les  amis  au  besoin. 

SAINT-AUGUSTIN  ITALIQUE. 

Un  paui^re  honteux  demandoit  V au- 
mône à  un  homme  qui  n' étoit  pas  à  son 
aise.  Hélas!  mon  ami^  lui  répondit  celui- 
ci  ^  si  vous  ne  m^ aviez  pas  prévenu^  f  ai- 
lois  vous  faire  la  même  demande. 


NOS.  446,  44 


SAINT- AUGUSTIN. 

N^   IL 

Il  y  a  plus  de  maris  qui  aiment  leurs  fem- 
mes ,  que  de  femmes  qui  aiment  leurs  maris  ; 
et  je  crois ,  dit  un  auteur  moderne ,  en  avoir 
trouvé  la  raison  dans  lamour  que  tous  les 
hommes  ont  en  général  pour  la  liberté.  Les 
femmes  dépendent  de  leurs  maris;  et  les  maris 
ne  dépendent  point  de  leurs  femmes.  Ajou- 
tons à  cette  pensée ,  que  la  plupart  des  dissen- 
tions qui  s'élèvent  entre  un  mari  et  une  femme 
viennent  le  plus  souvent  de  ce  que  celle-ci  veut 
sortir  de  l'état  de  dépendance  ou  la  nature  l'a 
mise.  Une  dame  vertueuse  fut  priée  par  une 
autre  dame  de  lui  apprendre  quels  secrets  elle 
avoit  pour  se  conserver  l'amitié  de  son  mari. 

SAINT-AUGUSTIN  ITALIQUE, 

Domiiien  donna  un  festin  bien  digne 
de  lui  y  c  est- à- dire  du  plus  indigne  des 
empereurs  et  du  plus  cruel  des  tyrans.  Il 
invita  tous  les  principaux  des  Sénateurs 
et  des  chevaliers  romains. 


N«s.   i5Ga 


s  AI  NT-AUGUSTIN. 

N^   IIL 

Une  veuve  vint  se  plaindre  à  l'empereur 
Théodoric^  de  ce  qu'ayant  depuis  trois  ans 
un  procès  contre  un  sénateur,  elle  n'avoit 
pu  encore  obtenir  de  jugement.  Il  fit  aussi- 
tôt appeler  les  juges.  Si  vous  ne  terminez 
demain  cette  affaire,  leur  dit-il,  je  vous  ju- 
gerai vous  mêmes.  Le  lendemain  la  sen- 
tence fut  rendue.  La  veuve  étant  venue 
remercier  le  prince,  un  cierge  allumé  à  la 
main,  selon  la  coutume  de  ce  temps-là:  Ou 
sont  les  juges,  dit  Tliéodoric?  On  les  amena 
devant  lui.  Et  pourquoi  avez-vous  pro- 
longé pendant  trois  ans  une  affaire  qui  ne 
vous  a  coûté  qu'un  jour  de  discussion? 

SAINT-AUGUSTIN  ITALIQUE. 

Un  seigneur  fort  riche  fit ^  dans  son 
testament^  des  legs  à  tous  ses  officiers^ 
excepté  à  son  intendant.  Je  ne  lui  donne 
rien  y  dit-il ^  parce  quil  me  sert  depuis 
plus  de  vingt  ans. 


N°*.  i442.   i443. 


GROS   TEXTE. 

On  reprochoit  à  un  de  nos  parasites 
modernes  5  qu'il  dînoit  souvent  chez  les 
autres.  Comment  voulez- vous  que  je 
fasse 5  répondit-il^  on  m'en  presse.  Il 
est  vrai^  repartit  quelqu'un^  il  n  j  a 
rien  de  plus  pressant  que  la  faim.  Ceci 
rappelle  ce  mot  de  Diogène^  on  le  re- 
prenoit  un  jour  de  ce  qu'il  mangeoit  en 
plein  marché:  Je  ne  l'aurois  pas  fait^  ré- 
pondit le  philosophe  cjnique,  si  la  faim 
ne  m'eut  pris  dans  ce  même  lieu.  On 
voit^  dans  Diodore  de  Sinope^  que  les 
Bardes  des  Celtes^  qui  étoient  les  poètes 
de  nos  anciens  Graulois,  les  suivoient  à 
la  guerre  pour  décrire  leurs  actions  hé- 
roïques^ et  qu'on  les  appeloit  par  hon- 
neur leurs  parasites. 


IN".   48o. 


GROS    ROMAIN. 

N^    L 


Un  jeune  Egyptien,  épris  d'amour 
pour  la  courtisane  Théognide,  rêva, 
une  nuit,  qu'il  couchoit  avec  elle,  et 
sentit,  à  son  réveil,  sa  passion  refroi- 
die. La  courtisane  l'ayant  su,  le  fit 
appeler  en  justice,  et  lui  demande  sa 
récompense,  puisqu'elle  avoit  guéri 
sa  passion  et  satisfait  son  désir.  Le  juge 
ordonna  que  le  jeune  homme  appor- 
teroit  dans  une  bourse  la  somme  pro- 
mise j  qu'il  la  jetteroit  dans  un  bassin, 
et  que  la  courtisane  se  paieroit  du  son 
et  de  la  couleur  des  pièces,  comme 
l'Egyptien  s'étoit  contenté  d'un  plai- 
sir imaginaire.  Ce  jugement  fut  ap- 
prouvé de  tout  le  monde. 


GROS  ROMAIN  ITALIQUE. 

Un  homme  de  finances jouoit  mille 
pis  tôles  au  piquet^  en  une  partie^ 
avec  un  seigneur  de  la  cour.  Celui-ci 
jugea  qu  il  pouvoit  le  faire  capot  et 
le  gagner  ^  s^il  lui  persuadoit  quil 
avoit  trois  valets ^  dont  cependant  il 
en  avoit  écarté  un.  Il  compte  le  point 
et  le  reste  de  son  jeu  jusquà  vingt; 
et^  après  avoir  rêj^é  un  moment^  il 
jette  sa  première  carte  ^  et  compte 
vingt-trois.  Son  adi^ersaire  lui  de- 
mande ^  comment  il  les  compte.  Le 
courtisan  recommence  à  compter  son 
jeu  ^  et  ajoute  trois  valets.  Le  renard 
sait  beaucoup  ;  mais  une  femme 
amoureuse  en  sait  davantage. 


N".   4j5.     Cet  assorliiueut  ne  se   trouve   pas  dans   le  spécimen  de  Gando. 


GROS    ROMAIN. 

W.   IL 

On  désigne  communément  par 
ce  terme ,  une  pensée  qui  surprend 
par  Fabus  des  expressions.  Elle  dif= 
fère  du  bon  mot,  proprement  dit, 
en  ce  que  celui=ci  joue  sur  la  pensée  ; 
au  lieu  que  la  pointe  joue  sur  le  mot. 
Comme  ces  sortes  de  plaisanteries 
roulent  ordinairement  sur  des  rap- 
ports faux,  il  arrive  presque  tou- 
jours que  ceux  qui  courent  après 
ont  communément  Tesprit  faux  au- 
tant que  superficiel.  Au  reste,  ce 
mot  pointe  est  ici  pris  ironiquement; 
car,  pour  continuer  la  métaphore, 
il  n'y  a  rien  de  si  plat  que  toutes  ces 
pointes  que  Ton  donne  pour  telles. 


N'o.  4-i. 


PETIT    PARANGON. 

Un  paysan  alla  consulter  un 
avocat  sur  une  afFaire.  L'avocat, 
après  l'avoir  examinée ,  lui  dit 
qu'il  trouvoit  sa  cause  bonne. 
Le  paysan  paya  l'avocat  de  sa 
consultation 5  et  lui  demanda: 
Monsieur,  a  présent  que  vous 
êtes  payé,  dites-moi  sincère- 
ment, trouvez-vous  encore  mon 
afFaire  bonne. 

ITALIQ  UE. 

Le  goût  du  jeu^  fruit  de  V a- 
varice  et  de  V eiinidy  ne  prend 
que  dans  un  esprit  et  dans  un 
cœur  vides. 


N"\  492.  4y3. 


GROS  PARAXGON. 

Une  feninie  «alante  disoit 
à  un  ivrogne  :  Croiriez- vous, 
monsieur,  que,  dejDuis  dix 
ans  que  je  suis  veuve,  il  ne 
m'a  2)as  j^ris  la  moindre  pe- 
tite démangeaison  de  ma- 
riage. 

I  TA  LIQ  LE. 

Carlin  y  en  parlant  de  la 
noblesse  y  disoit:  Si  Adam  s'é~ 
toit  avisé  d'à  cheter  u  n  e  charge 
de  secrétaire  du  roi,  nous  se- 
rions tous  nobles. 


y-\  5os. 


PETIT  CANON. 

Un  poète,  reconnu 
pour  plagiaire,  se  van- 
toit  orgueilleusement  de 
sa  prétendue  facilité  à 
faire  des  vers,  et  disoit 
que  les  plus  longs  poè- 
mes ne  lui  coûtoient  rien. 

ITALIQUE. 

Je  le  crois,  répondit 
quelqu'un  fatigué  de 
ces  propos. 


N««.  5i4.  5i5. 


GROS    CANON. 

Avec  le  temps 
etlapatience^on 
acquiert  les  arts 
et  les  sciences. 

GROS    CANON   ITALIQUE. 

Ton  ami  est 
malade.  Il  {at- 
tend demain. 


N"\  53 o.  53 1. 


LETTRES  DE  DEUX  POINTS. 


Deux  points  de  Nompareille. 


THEODORE  SIMON  GANDO 
FONDEUR  À  BRUXELLES 


Deux  points  de  Mignonne. 

P.  FRANÇOIS  GANDO 
GRAVEUR  À  PARIS 


Deux  points  de  Gaillarde. 

JEAN  LOUIS  GANDO 
FONDEUR  A  BÂLE 


Deux  points  de  Petit-Romain. 


CLAUDE  LAMESLE 
FONDEUR  k  PARIS 


No^  i56i.  i562.  i563.  732. 


Deux  points  de  Philosophie. 

NICOLAS  GANDO 


Deux  points  de  Saint-Augustin. 

J.  COT  À  PARIS 

Deux  points  de  Gros-Texte. 

A.  BESSEMER 


Deux  points  de  Gros-Romain. 

N.  GANDO 


Deux  points  de  Parangon. 

PIERRE 


N"s.  73 1.  730.  729.  i56i.  7: 


ECRITURES. 


RONDE  DE   SAINT-AUGUSTIN. 

oÇo  cjzauii  (3oiiblj ,  patfatii^  ^ej  f  luitevibiilj  ^o 
aueùiueéc  uoÙ>aîù^ ,  ^lôoïk.  ,  au  etani^  ^evaiii^  utio 
pfaco  ou,  i£.  iJ  avoii^  utio  pafiââatio  ol?  ^tufeir,  i£.  jîi^ 
ptoitiettto  cmcjuaiito  fouidC/  eu  aut  ôetoik,  aâde%j  ^zavtj 
pouv  Jxxito  teuùâiv  co  coup  ^o  titain.  e!//I:?oiidei- 
mieuir,  fui^it^  un  Joft)ai^  pludL  coutaaeux?  ciuo  ^ci^ 
auizeéu  ^  lo  <^oucX^  quitter  ^ett.  ciiiojuaiito  îoxiiâu  auzj 
^onôu  uio  ptouiettex^,  ôt  cyotto  ^fteéôo  iiio  cveuu. 
Jaittj  Seiaeiix^^tj  uioj  couipamiio.  <îo  ^tiuco,  ciui 
ttouvoj  ^o    foj    aeuetoôtto  ^aii<^    co    SoÎT^au. 

BATARDE  DE  GROS  ROMAIN. 


ÇLythaaoraaj  côlj  iej  premietr  de(Xj 
anciencv  qj  aaeâ.^  aui  aiiL)  pricv  iej  nom 
dcj    Hmlojophej.       (ifi.    poridôoii^    au    ^emcv 


dej     S^ar^ 


otiip 


dernietr     fèoi.     dej     fL 


omej 


eu     norf       vacv     au     '^emoj     dej     SA^mcv  y 
commej      pluôi^euraj     tej     âé/ùtent^. 


N"^  018 


91».  9-29. 


COULÉE  DE  GROS  ROMAIN. 

Xej  petej  a  um^  9^  auôaii  dej  uioutoiiL?.  Xej 
ÇL  audaH'  uuu  y  uv  uuii^  y  itouvetr  iej  Cutej  y 
eu  det^Heutcv  Hoi^  veute^  eu  dcv  potfej  aj> 
I?eut1ev-  iouLy  oouceiueiif^\  Xej  Cutej  y  uu  ai^i^  : 
^uej  uej  veuttiex?-'Vouïû  pui/C  Jottj  :  "T  a- 
voi^  peiiir  y  dlt-it  y  dej  h^ou^ù  téveiuetr.  ^u  u 
a-t-ii- y  oii^  lej  Cti^tej?  QyfboM^  petej  dCJ  uiou- 
toit^  y  a  LU  fej  a  audan  y  quaud  tej  duiïù  patti. 

RONDE  DE  GROS  ROMAIN. 

\Jx)   JtauQyp  y   auoiaiieJ  ^Icowcniv  ^rj  ap- 


F 


a^evtceJ   avec  bOY)  eviM/CM/ti  ^epuiiîc  ptU/6ieu^(X. 

iwi  uwej  \}(Xivit>  ii^c/tMv.  \)r)  6oio   autuu  bo 

t  J  ta  Lien  ùj  pxii^  vav^eAtihceJ  ^  \0  ^elive/tAa^_, 
ei^  tut  Uiettai44^  iv  i30ianax(^  .^liu  loo  aotao y  vD 
uietiaçoL)  ^i!J  it)  {ii^Ai  y  A  if  iiO  ^eulon^   Jjieit. 


N"\  9^8.  91CJ. 


I 


GRECS 


ORIGINAIRES  DE  LA  FONDERIE 

DE 

CLAUDE  LAMESLE. 


GREC  DE   PETIT  TEXTE. 


TiTcct,xo(noi  OTvXiTct,!  xcti  tTvyifTrfctTtvavro 
tTTt  /SccaïKice..  hvivd-tv  l^iXce.vvii  UrûL^fx-ov 
tva.  Tra.fo.O'xyya.ç  -Kivn  Itti  ■jvvKo.ç  tTi? 
ILiKtxicLÇ  xoLt  rîi?  2t/p/'«,ç.  i<ra.v  Si  roÂira. 
ivo    re/'p^n ,    xa,i    ro    fxir  'îtrcoâ-iy    ro    Trpo 

ÇvAaXM,  ro  Si  êÇO)  ro  Trps  rîi?  St/p/a.ç  0a.- 
Cihluç  tf^iyiTO  (fiuXccxh  (pukXTTîiv.  S  tcc 
ju.iO'ov    Si    lu    nvrcoy    Trora-^oç    K«pa"os- 

OKO^Ût,    £lJpOÇ    TrXlâ-fdV.    «.TTXV    Si    ro    [JiKT^V 

T«c  riix^"  tio-u-v  CrxStoi  Tfitç'  xoLi  TrctfiX- 
â-ùv  oîix  ïiv  ^icf  iv  yxf  »  TTXfaSoç  anvii 
Kcii  roc  riixA  £'V  rliv  à-x\a.rrct.v  xccâ-ii- 
yovra,,  VTric^iv  «T'  »(Tct.v  Trsrpa,/  riKt.&xrof 
iTTi  Si  rc7?  riîx.^i7iy  à/xforepo/ç  i<pii<T- 
r'nxi<T(/.v  TTvXoLt.  roLvr^ç  îyixa,  r',\ç  Tra-foSav 
Kùpo?  rkç  ycâJç  fji,iri7rîfA-^ccro ,  'ItcùùÇ 
I-kKitclç  a.-KU0i(i'xcrmy  litru  xa,)  «ç«  rmy 
TTvXÔùy,  xoci  /iia.O'x/uiyoi  rovç  TnXi/ijiiovç 
TTXfiXâ-otiy,  Il  ^vXxrroilv  irri  rxiç  ^vfixiç 
TTVXa/ç,  ç,7r£p  uiro  Troiitcriiy  ô  Kùpo?  roy 
'A^poKo^ac,  'ép^ocT-a  ttoX^  OTpartu^a. 
'A^pcxo^aa?  «î'ê  oC  Tcùr'  ivro'iviO'iy ,  àxx' 
e7r£<  )iXoi/(re  Kùpoc  li'  K/X/x/a  cera.,  «ca- 
OTpê-sj^a?  ex  Oo/c/'x*)?  Trapà  /^xo'ihîx  ocTrM- 
XAVviy,  îx^^f  ^^  iXÎyira,  rfixxoyrx 
/xufixSxç  (Tr^xrtxç.  ivriv^iy  i^iXxvyii  Stx 
'^iifixç  O'ra.d-fjt.oy  ivx  -rrx^a.O'x'yyxç  irivri 
lïç  Mt/p/itciToe,  TToKiy  oîxov/xiyny  rVo  $o/- 
yix(i>y  î7n  r~,\  d-xXxrrri'  i/UTrô^ioy  S''  h  ro 
X^p/oc  XXI  wp^oi/K  xvrod-i  ôxxxSiç  TroXXxi. 
lyrxxid-'*  ifJiiiyxy  ifjxi^xç  iirrx'  xx)  "Eiy'ixç 
ô  'Apxaç-  <TT^xrnyQç  xxi  TlxTicuv  ô  Miyx- 
fivç  i/ji.,^xyriç  £i?  TrXoTtK  xo,/  rà  itXuiTrou 
aX,ix  ly^'iixivoi  XTriTrXiva'xy ,  w?  /x£c  ro7ç 
TrXmmiç  iSôxovy  ipiXorifAn^iyriç  %ri  roii? 
O'r^xriurxç  xvruy  niiç  Trapà  KXfapp^-OK 
ocTTiX^oyrxç  ûç  kirtoyrxç  liç  rliy  '^XXccSx 
TTXXlV  xxi  oi)  Trpoç  /ixO'iXix  l'ix  Kîîpci? 
roy  KXtXfX''"  ÎX^'^'  ^^"  <^'  viiTxy  cc<pxyùçy 
Sr,\X^i  Xoyoç  (,ri  Siuxoi  xvToiiç  Kùpo? 
7-p/Mp£0"/«  XXI  01  fMy  Ytiix<'yro  ûç  SiiXwç 
oyrxç  xvroi/ç  XYi^^]\yxi,  o't  S''  wxrc/pof 
Il  ùxurroiyro.  Kùpoç  Si  (rvyxxxicrxç  rovç 
(Trfxrviyovç  ilrriy ,  ^A7roXiXoÎ7rx(riy  iifj.xç 
Ziyîxç  XXI  ITi^cr/ù)»'.  aXX*  iv  yi  fxivroi 
iiri7TX'T^(,>v      'in     oxiri     oc7roSiScxxx<riy  • 

OiSx     yXO     CTT))     0/'p^OCra<*      OVrl     XTTOTl'l^iV- 


yxTiy  ix^  y°^f  rp/«p£<?  ùiO'ri  iXiiy  ro 
ixiiyccy  TrXoloy  kxxx  (xx  rovç  d-ioiiç  olix 
'îyu.yi  xvToùç  SiM^ûùy  oîiS^  Ipe?  oiiSùç  mç 
lyù  ïoiÇ  fjLiy  ày  TrapTi  riç  pi^pw/xa/,  iTTiiSav 
Si  ccTriiyxi  /iovXytrxi,  (rvXXx/i<cy  xxi  xvrovç 
xxxuiç  TTO/w  XXI  rx  p^pM^ar*  cc7ro<rvXoi). 
ocXXcc  ïôyrooy,  liSorlç  or/  xxxîovç  lîtri -Trifi 
iiixccç  »  yiixiiç  7r£p/  ixiiyovç.  y.xiroi  'ix^  y^ 
xvrioy  xxi  rîxyx  xxi  yvyxïxxç  ly  Tp«X- 
XKTi  (f:f>ovfov/jt.iyx'  kxx'  ovSi  rovmy  <rri- 
fiiiToyrxi,  kxx'  àTTOÂM-vj/Ocr*/  r'Àç  TT^ofT^iy 
lïiXX  7r£p<  i[À.i  xtir'^ç.  XXI  0  (/.ly  rxvrx 
tl/ciy  •  01  Si  'ŒxXyiïlç,  Il  riç  xxt  «.■^V(jt.ô- 
rifoç  h  TTpoç  r>iy  a,vx/ix(Tiy ,  kxovoyriç 
ry/y  Kiipou  ccfirtiy  tiSioy  xxi  7rfoâ-v(iorifoy 
O'vyiTTOfivoyro. 

Wiroc,  rxvrx  Kîîpoç  i^iXxvyti  (Trxd-- 
(J.OVÇ  rirrxfxç  irx^xŒxyyxç  uxto'iy  itti 
roy  X.xXoy  irorx(/ioy  ^  oyrx  ro  iv^oç  irXÎâ-- 
pou,  TrXjipii  S''  ïx^^<^v  (LiyxXmy  xxi  7rf>xîo»y, 
ovç  oî  2vpo<  d-ioiiç  'iyo(J!.i^Qy  xxi  ccSixuy  oîix 
utfoy ,  ovSi  rxç  TfifiiCrifixç.  xï  Si  xu(ixi 
ly  xlç  lax'niovy  Tlx^vtTxnSoç  i<rxy  lîç 
^ùjyrty  SiSo(tîvxi.  lyrivâ-iy  i^iXxvyii  (Trxâ-- 
(jcovç  TTitri  TTXDXfTxyyxç  roixxovrx  itti 
rxç  TTriyxç  rov  AxcSxroç  ■7rorx(/,ov  ,  ov  ro 
£Ùpo?  TTAÉ^-pov.  hru.vd-x  ÏKTxy  ra,  'RiXÎO'voç 
Hx^rixiix  rov  Si/p/'ûtç  apÇetiTO?,  xx\  Trapa- 
SiiToç  TTxyv  (j.iyxç  XXI  xaXÔç,  'ix'^" 
TTXvrx  <.<Tx  mcxi  ^vovJ'i.  Kupo?  «T'  xvroy 
i^ixo-\.i  XXI  rx  (ixfTÏXiix  xxr'ixxvTiy.  h- 
nvàiy  l^iXxvyii  <rrxd-(jt.ovç  rfi7ç  vrxfx- 
(Txyyxç  TTiyrixxîSixx  ITTI  roy  Eùçipxriic 
'KOrx(jt.oy  oyrx  ro  £Ùpo?  rirrx^tjcy  CTrxSiùiy 
XXI  TToXiç  xvroà-i  OùXiïro  (iiyxXvi  xxi  iiiSxi- 
(jiivy  Qx-^xxoç  Cto/za.  âr«,v^<*  'î(xiiyxy 
M(tîfxç  Trîyri'  xxi  Kupoç  (ji.irx7ri(jt,-^x- 
(xiyoç  rovç  (Tr^xrviyovç  roiy  'ExAmcw)'  fXf- 
yiy  'on  «  'oSoç  'iCoiro  Trpoç  /ixo'ixix  (xiyxy 
liç  Hx/ivXiùyx'  xxi  XiXiîiii  xvrovç  Xiyiiy 
rxvrx  ro7ç  (Trfxnûrxiç  xxi  kyxTniâiiy 
'îviCà-xi.  o\  Si  Troi-i\<Xxyriç  ixxXriO'îxy  avriiy- 
yiXXoy  rxvrx'  oî  Si  arcixnurxi  £p^a.X£- 
TTxnoy  roiç  (TrDxrYiyoïç,  xxi  ipxtrxy  «.t^roi;? 
TTCcXxi  rxvr^  tiSôrxç  XfVTrriiy,  xxl  oix 
i^x(rxy  iiyxi,  ixy  (xit  nç  xiirolç  p^pM/zaro. 

SiSÔù,    «îT/TEp    ro7ç    TCfOrlfOIÇ     (xirx     Kûpoi/ 

a.yx(ict.(Ti  TCXfCC  roy  Trxrîfx  rov  Kvpoi/,  xxi 


N«   583. 


GREC  DE   CICERO. 

/(TêÇ    ZOil    SbùKciS'iÇ'   TcLVTdL    S%    Tct    ^-iiptCt   01    ITTTrUÇ   èVlOTî    iS^tW- 

Kov.  aan  01  julv  ovoi,  îttîi  tiç  S^tMKOt^  TrpoS'ûdjuovTîç  ea-TctcroiV' 

TTOXV     yotp      TMV     liTTTrCùV     Wp'^OV     ^'S.TTÛV'      KCtt      TTOLXiV  j      ITTU 

TrXmiduCoi'îV  01  'iTTTToi^  Tctlirov  îTToiovv  j  Kcti  ovK  hv  XoL^îlv  ^  il 
juri  S^iatcrroLVTîç  ol  iTTTriîç  d'i^pciùîv  S^ictS'î^ojuîvoi.  ta  S's  zpict 
T«j/  cLXi(Tiio fxiv ùùv  hv  7rctpct7rXn<ncL  to7ç  IXctcpîioiç .^  ctTrccXcùripct 

/ê.  (npOV^OV  «Tg  OvS^Ùç  iXaL/2>èV'  ol  cTg  S^lW^CtVTèÇ  TMV  ITTiricùV 
TCtyy  iTTCtVOVTO'  TTOXU  yctp  CL7Tl(T7ra,T0  (pîVyOU(rct^  To7ç  fJLiV  7V0<Tl 
S'pÔfJiCù^  TdCiç  Si  TTTèpVÇlV  CtipOVG-Ct^  6d(r7r9p  la-TtO)  XpCù/Jiivt}.  ToiÇ 
Se     OdTlScLÇ    civ    TIÇ    TdUyy     CtVKTTVi^     êtTT/     Xct[Ji(icLVilV'     TriTOVTCtt 

ykp   fipcc^u  ùûO'Trfp   TripSizîç   koli  Tctyjj   oLTrctyopîvovo't.  tcl  Si 

ZpîCt  OLVTOùV  7\SKrTCL  i)V .  TTOpivÔfJLiVOl  Si  StcL  TCtVTt)Ç  TYÏÇ  X^P^'' 
CL(pi}tVOVVTa,l  iTTi  TOV  Mci(r}tCtV  TrOTOLfJLOV  ^  TO  iiipoç  TrXi^picuov. 
iVTctvd-et  hv  TToXtç  lpi\[JLï\j  /ULiydXn ,  ovojuct  «T'  dÙTri  KopcrcôTii' 

TriptippîÎTO  S'  Ct[)TV\  VTTO  TOV  Md^KCt  KUitXCà.  hTOUjà"^  'îJUîlVCtV 
yi/xipctç  Tpiiç  KûLl  iTTiCrtTis-ûLVTO.  IvTiV^iV  l^iXcLVVil  (TTcL^fJ.OVÇ 
ipïIjUOVÇ  TpKTKOLlSiytOL  7rcLpaL(rûLyycLÇ  iVîVYtZOVTA  TOV  'Ev(ppoLTi)V 
TTOTCtfJiOV  iV  Si^tûi  '^X^^J  ^'^^  0i(pmVi7T0lt  iTTl  TlvXcLÇ.  iV  TOVTOtÇ 
TOÎÇ     (TTcL^fJLolç     TTOXXoL     TMV     VTTO^VyiOùV     OLTTMXîTO      CtTO    XtJUOV 

où  yoLp   iiv  XPpTOç   ovSs   ctXXo   ovSh  SévSpov  j   olXXol  -^iXn  m 

CLTrcta-Ct  ri  X^P^'  ^^  ^^  IvOtZOVVTiÇ  OVOVÇ  CCXiTCtÇ  TTCtpcL  TOV  TTOTCt- 
fXOV  opUTTOVTîÇ  ZûLl  TTOtOVVTiÇ  îîç  Bct/iuXCûVci  ijyOV  KOLt  ItTOùXoVV 
KCtt    OLVTCtyopd^OVTiÇ    (TITOV    î^MV.   Tû  Si    (TTpaLTèVJUOi  0  (TITOÇ  iTTi- 

A/TTgj   ncti  TrpicLG-^on   ova  hv  il  jum  h  tjÏ  AvSta,  kyopa,  h  tu> 

KupOU  ^Ctp^cLpiaw  y  Ti)V   acLTri^m   CtXiVpOùV   m   OiX(plTùùV  TèTTCtpCOV 

(TtyXùùV.  0  Si  (TiyXoç  Suvoltch  Iittcl  o^oXouç  tcctt  yijuiM^oXtov 
Attihouç'  v\  Si  KcLTri^T)  Suo  x^^^*^°^Ç  "Attikolç  iXVP^^'  ^p^^ 

OÙV  iO-^lOVTiÇ  ol  (TTpoLTtCùTûit  SnytyVOVTO.  ilV  Si  TOVTOùV  TùûV 
(TTCtd-JUMV  obç  TtÔlVU  jUCtZpOVÇ  HXciVViV  ,  OTTOTg  «  TTpOÇ  vScop 
^OVXOITO    SlctTiXi(Tctl     V\    TTpOÇ  ^/AOJ'.    Kct)    Sï\    TTOTi   (TTiVOX^plctÇ 

itctt  7rv\Xov  (poLvivTOç  Tctlç  oL/xd^ctiç  So<r7ropiUTOV  gTT-gVxM  0  Kvpoç 

(TVV    T07ç    TTip)    CtVTOV    CLpl(rTOlÇ    HOU    iÙSctt/UOViO-TctTOtÇ  KO.)    iTOL^i 


N".   lifii. 


FLEURONS  ET  VIGNETTES. 


i658 
1661 

1677 

169V95      ^^^P 


Corps 


Sfâ'^ 


762/63 


1777/78 


1783 


i8o4/o5 


i8o6/o5 


^^^^^■S^^ 


1919/20       ^s^p 


16 


18 


18 


28 


EPREUVES 

DES    CARACTÈRES 


DE    LA    FONDERIE 


DE   N.  P.    GANDO, 


GRAVEUR  ET  FONDEUR. 


SECOND     RECUEIL. 


A     PARIS, 
Rue  des  Maçons,  N".   31. 


f 


ROMAINS  ET  ITALIQUES. 


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N  O  M  P  A  R  E  I  L  L  E. 

y°.  1. 


Waarde  Medeturger. 


Dezen  îngeslotene  îs  van  ^Mons'  Bessemer  die  mij  op  mijn  vertrek 
dezelve  medegaf  dog  onder  weg  naar  Brussel  door  Een  accident  aan  mijn 
voet  heb  ik  in  Brussel  mijn  vertlijf  moeten  houden  en  terwijl  ik  er 
^erk  Tond  heb  ik  er  tôt  nog  toe  gewerkt  dog  mij  tlians  weder  in  staat 
Levindende  om  mijn  Reijs  te  kunnen  Toortzetten  is  mijn  vriendelijk 
verzoek  of  ne  mij  wel  zult  gelieven  te  laten  weten ,  of  ne  al  of  niet 
mij  in  ne  Gieterij  kunt  Ginploijeren,  Letbe  door  de  geduurige  Expe- 
rientien  mij  in  de  kunst  zoo  wat  geperfectioneert  namentlijk  in  tet 
justisieeren  en  vormen  Stellen.  En  in  de  Letteren  ran  didot  en  gando 
te  parijs  3  jaren  gewerkt,  ne  kunt  van  mijn  persoon  en  gedrag  na 
infonneeren  Bij  den  Burger  H^  van  Staden  te  amsterdam  en  Bij  den 
Burger  J'  De  Groot  in  s'  Hage  verder  toope  indien  door  ue  geoc- 
cupeert  worde  ue  te  voldoen  Blijve  intnssclien  met  agting  Waarde 
Medeburger 

Ue  Dw  ;   Dienaar    en   Medeburger 
Mijn  adres  is  Bij 

Le  citoyen  De  bakker  au 
Lion  Blanc  au  Borgwal  à  Bruxelles. 


J:   H:    HUB>'ER. 


NOMPAREILLE    I  TALIQ  U E. 


JTaarde  Landgenoot , 


Xeemende  de  i-rrherd  UE.  hier  nea-ens  eenige  Proeven  van  Carac- 
tères over  te  zenden  die  ik  hier  te  parys  voor  een  Lettergieter  gegra- 
veerd  heb,  en  daar  ik  tans  voorneemens  en  selfs  reeds  werkeljk  be- 
gonnen  ben  voor  myn  ej-gen  reeks  te  werken ,  Neeme  ik  de  vryheyd 
LEd'  mm  dienst  aan  te  bieden,  om  de  matrrsen  van  die  Caractères 
die  VEd'  mogt  nodig  hehben  te  Leei-eren ,  wyl  ik  de  pansons  voor  mr 
behouden ,  ten  zy  LEd'  daar  ioe  mogt  inclineere  waar  toe  ik  niet  on- 
geneegen   ben  met    UEd'  te  handelen. 

LEd'  andwoord  ajwachtende  hebbe  de  Eere  te  zyn 

Myn  adres  is 
au  Citoyen  Bessemer,  Graveur  en   Ca- 
ractères rue  Se\-eiin  -Yo.  //^,  à  Paris. 


LEd'  DJ'aardige  Dienaar, 
BESSEMER. 


NOMPAREILLE. 
N».    III. 


Parys  4  frimaire   1795. 


Geerde  Medeburger. 


Het  is  niet  zonder  verwondering  dat  ik  uyt  UWE  laaste  gesien  heb 
dat  men  eene  geheele  andre  manier  van  gieten  in  hoUand  oeffend, 
als  die  men  te  parys  in  't  werk  steld  ;  en  meer  als  5o  jaren  geleden 
geadopteerd  wyl  die  ongelyk  beter  is  om  de  juyste  wydte  van  de 
Letters  te  kunnen  opserveren  en  door  dien  weg  die  op  het  papier 
beter  te  doen  voorkomen,  indien  ik  geweten  had,  dat  in  holland  de 
gewoonte  waar  om  ailes  naar  de  M  te  regulereu  zoude  zulk  my  even 
geweest  zyn  om  die  voor  UE  te  maken,  allenlyk  met  dit  onderscheyd 
dat  in  plaatse  ik  UE  voor  de  justificatie  10  St.  gevraagd  hebbe  zoude 
ik  den  andre  manier  niet  mindre  als  i5  St.  per  stuk  kan  leveren  aan— 
gesien  de  meerdere  moeyte,  dog  dit  laate  ik  aan  UWE  Edelmoedig— 
heyd  over  :  wenste  gaarne  te  weten  of  die  aan  UE  gezonde  Matrysen 
lang  genoeg  zyn  van  boven  voor  de  dikte  van  UWE  vorm,datde 
linie  laag  genoeg  kan  komen  so  niet  zal  ik  genoodsaakt  zyn  een  ge— 
heel  nieuw  afslag  te  vervaardigcn ,  dus  eene  merkelyke  schade  voor 
my,  egter  zal  my  niets  te  zwaar  vallen  en  zal  al  doen  wat  mogelyk  is 
om  UE  in  ailes  genoegen  te  geven ,  te  meer  daar  ik  hoope  dat  dit  zal 
nemen  verders  voor  UE  te  werken  het  zal  my  aagenaam  zyn  eene 
gehele  complète  afgiedsel  van  eene  UWER  caractères  te  moge  hebben, 
welke  my  zal  konnen  dienen  om  my  daar  na  te  reguleren  ik  ver— 
wagt  dien  ten  spoedegsten  en  zal  zo  dra  die  by  my  gearreveerd  zyu 
ten  eersten  myn  werk  maken  om  die  aan  UE  in  de  gevraagde  order 
te  doen  toekomen  entusschen  hoope  UE  my  het  genoegen  te  doen  de 
op  UEd.  getrokken  vvissel  te  honoreren,  de  Heer  delhaas  welke  my 
meer  als  i5  jaren  kend  zal  myue  borge  voor  UE  zyn  intussen  zal  ik 
al  aanwenden  niet  alleene  voor  deese,  maar  so  verdre  affaires  voor 
UE  my  opgedragen  werden  al  te  doen  wat  strekken  kan  om  UE  eene 
volkomen  genoegen  te  besorgen  blyve  na  Minzame  Groete 

UW  Medeburger 
BESSEMER. 


NOMPAREILLE    ITALIQUE. 


A.  Bessemer,  Hollandais  de  naissance,  était  émigré  en  france 
en  tySy  à  la  suite  du  moia>enient  patriote  dans  les  Pays-Bas.  Il 
semble  açfoir  essayé  d'exercer  le  métier  de  grai'eitr  pour  son 
propice  compte  mais  plus  tard  il  s'est  engagé  comme  grai>eur  de 
poinçons  dans  la  fonderie  de  Gando. 


PETIT    TEXTE. 
N".    III. 

Si  on  m'a  fait  venir  ici  pour  me  demander  compte  de  ce  qui  s'est 
passé  dans  la  dernière  bataille  où  je  commandais,  je  suis  prêt  à  tous 
en  instruire;  mais  si  ce  n'est  qu'un  prétexte  pour  me  faire  périr, 
comme  je  le  soupçonne,  épargnez-moi  des  paroles  inutiles:  voilà  mon 
corps  et  ma  vie  que  je  vous  abandonne,  vous  pouvez  en  disposer.  » 

Quelques-uns  des  plus  modérés  d'entre  le  peuple  lui  ayant  crié 
qu'il  prit  courage,  qu'il  continuât  sa  défense:  —  «  Puisque  j'ai  affaire 
à  des  juges,  et  non  pas  à  des  ennemis,  ajouta-t-il,  je  vous  dirai,  Ro- 
mains, que  j'ai  été  fait  consul  avec  Virginius  dans  un  temps  où  les 
enuemis  étaient  maîtres  de  la  campagne,  et  où  la  dissension  et  la 
famine  étaient  dans  la  ville.  C'est  dans  une  conjoncture  si  fàclieuse 
que  j'ai  été  appelé  au  gouvernement  de  l'état.  J'ai  marché  aux  enne- 
mis, que  j'ai  défaits  en  deux  batailles,  et  que  j'ai  contraints  de  se 
renfermer  dans  leurs  places;  et,  pendant  qu'ils  s'y  tenaient  comme 
cachés  par  la  terreur  de  vos  armes ,  j'ai  ravagé  à  mon  tour  leur  terri- 
toire, j'en  ai  tiré  une  quantité  prodigieuse  de  grains,  que  j'ai  fait 
apporter  à  Rome,  où  j'ai  rétabli  l'abondance. 

»  Quelle  faute  ai-je  commise  jusqu'ici?  Me  veut-on  faire  un  crime 
d'avoir  remporté  deux  victoires?  Mais  j'ai,  dit-on,  perdu  beaucoup 
de  monde  dans  le  dernier  combat.  Peut-on  donc  livrer  des  batailles 
contre  une  nation  aguerrie,  qui  se  défend  courageusement,  sans  qu'il 
y  ait  de  part  et  d'autre  du  sang  de  répandu? 

»  Quelle  divinité  s'est  engagée  envers  le  peuple  Romain  de  lui  faire 
remporter  des  victoires  sans  aucune  perte?  Ignorez-vous  que  la  gloire 
ne  s'acquiert  que  par  de  grands  périls  ?  J'en  suis  venu  aux  mains  avec 

PETIT    TEXTE    ITALIQUE. 

des  troupes  plus  nombreuses  que  celles  que  vous  m'aviez  confiées ,  et 
je  n'ai  pas  laissé,  après  un  combat  opiniâtre ,  de  les  enfoncer  ;  f  ai 
mis  en  déroute  leurs  légions,  qui,  à  la  fin,  ont  pris  la  fuite.  Pouvais- 
je  me  refuser  à  la  victoire  qui  marchait  devant  moi?  Était-il  même 
en  mon  pouvoir  de  retenir  vos  soldats,  que  leur  courage  emportait , 
et  qui  poursuivaient  avec  ardeur  un  ennemi  effrayé?  Si  j'avais  fait 
sonner  la  retraite,  si  j'avais  ramené  nos  soldats  dans  leur  camp,  vos 
tribuns  ne  m' accuseraient-ils  pas  aujourd'hui  d'intelligence  avec  les 
ennemis?  Si  vos  ennemis  se  sont  ralliés,  s'ils  ont  été  soutenus  par 


N"*.   1-6.   i; 


GAILLARDE. 

N°.   I. 


Paris  den  24  proirial. 

Waarde  Medeburger 

Daar  UEd.  begerig  schyud  te  zyn  om  de  prysen  te 
weten  der  Caracteren,  diend  deese  in  andwoord  op  UEd. 
geëerde  van  de  26  Mey  laastleeden,  dat  de  5  Soorte  van 
Caracteren,  als  de  Nomparelle,  Petit  Text,  Petit  Romain, 
Cicero,  S*  Augustin,  aan  UEd.  kan  leveren  à  35  Stuy- 
vers  holl*  par  Matrysen  de  Caracters  die  kleynder  zyn 
als  de  Nomparelle  of  grooter  als  de  S*  Augustin  kunnen 
verhoogen  in  de  preysen  na  de  cleynte  of  groote  van  de 
Letters  wyl  ik  begonnen  ben  met  geheele  nieuwe  Stem- 
pels  te  graveeren  waar  aan  ik  geene  moeyte  spare  om 
die  zoo  veel  my  doenlyke  is  te  perfectioneren  zynde  al- 
rede  verre  gevorderd  met  de  Nomparelle  die  in  de  tyd 
van  4  maanden  compleet  zullen  zyn,  flatere  my  dat  die 
aan  UEd.  meerde  sullen  voldoen  dan  de  aan  U  overge- 
zonde  proefies,  indien  UEd.  verkiest  dat  ik  de  Matrysen 

GAILLARDE    ITALIQUE. 

hier  zal  ajustereii  kan  UEd.  die  poor  10  Stuyvers  holld 
aanneemen  hier  door  resekeert  UEd.  niet,  dat  door  een 
onuoorsigtigheyd  van  iets  te  laag  af  te  veylen  UEd.  in 
de  noodzakelykhyd  zy  nieuwe  matrysen  uyt  parys  te 
laten  komen,  hier  op  UEd.  andwoord  afwagtende  blyve 
na  toewensch  pan  heil  en  broederschap 

UEd.  dienst  paardege  landgenoot 
A.  BESSEMER. 


N»*.  1439.   i44o. 


PETIT     ROMAIN. 

N^    VI. 

Paris  den  24  Jul  j  1 795. 

Waarde  Medeburger 

In  het  onsekeren  zynde  of  UED  myn  andwoord  op 
den  UWE  van  de  25  Mey  ontvangen  hebt  neme  ik  de 
VI  jhejd  UED  dese  te  zenden  met  de  prysen  van  de 
5  soorte  Caracteren  die  het  meerst  gangbaar  zyn,  als 
de  Nompareille,  Petit  Text,  Petit  Romain,  Cicero, 
S*  Augustin,  aan  UED  kan  leveren  a  35  Stuyvers  HoU'^ 
het  stuk  voor  elken  Matrysen  in  de  tyd  van  4  maanden , 
wyl  ik  begonnen  ben  met  geheele  nieuwe  Stempels  te 
graveeien  waar  aan  ik  geene  moeyte  spare  om  die  zoo 
veel  als  my  doenlyk  is  te  perfectioneren ,  zynden  alrede 
verre  gevoorderd  met  de  Nompareille  die  in  dien  tusen 
tyd  compleet  zuUen  zyn,  indien  UED  verkiest  dat  ik 
de  Matrysen  hier  zal  ajusteren  kan  ik  UED  die  voor 
10  Stuyvers  HoU'i  aan  nemen. 

Het  zal  my  aangenaam  zyn  UED  andwoord  op  desen 
te  mogen  hebben  wyl  ik  dagelyks  aangesogt  werd  om 
afslagen  te  fourneren  en  daar  ik  het  eersten  die  aan 

PETIT    ROMAIN    ITALIQUE. 

UED  hehbe  aangepresenterd  zoude  ik  gaare  den  eersten 
afslag  aan  Uwe  leveren ,  wyl  die  soo  als  UED  weet  het 
suyverste  dus  wacht  ik  in  dit  geval  enkel  op  Uwe  decisie 
om  daar  na  my  te  reguleren ,  in  afwachting  van  een 
spoedig  aiidwoord  hebbe  de  Eere  te  zyn 

JT^aarde  Medeburger 

UED  D.  Vaardege  Landg^ 

A.  BESSEMER. 


N-^^  288.  289. 


PHILOSOPHIE. 

N°.    I. 


Paris  ce  16  Juin  1818. 


Monsieur 

Jai  reçu  en  son  temps  llionneur  de  Votre  lettre  du  3o 
Avril  dernier  dans  laquelle  était  inclui  Votre  mandat 
sur  Mr.  Audinet  fesant  le  solde  de  tous  comptes  entre 
nous  en  Vous;  remettant  le  mien  j  étais  bien  persuade 
qu'il  y  avait  une  oubli  de  ma  part  a  Votre  prejudix 
puisque  je  trouvais  mon  compte  arrêté  avec  Vous  après 
mon  envoy  du  6  Décembre  i8i5  pour  les  fournitures 
et  un  Nouveau  Compte  de  fournitures  parlant  de  mon 
Envoy  du  24  Juillet  1816. 

Javais  donc  oublié  d  inscrire  la  remise  de  Votre  traite 
à  mon  Profit  sur  Mr.  Audinet  le  5  Février  1816  qui  ter- 
minait le  dernier  compte;  je  Vous  demande  excuse  de 
cette  négligence. 

PHILOSOPHIE    ITALIQUE. 

Jai  reçu  dans  T^otre  même  lettre  la  ligne  darahe  que 
T^ous  m  envoyez  pour  modèle  de  celui  que  T^ous  dési- 
rerez faire  Qraver  mais  elle  ne  peut  m  être  d'aucune 
utilité  dans  cette  ligne  chaque  mot  a  l  air  de  nêtre 
quune  seule  lettre  et  cela  ne  peut  pas  être  mais  je  ne 
puis  deviner  au  commence  et  au  finis  chaque  lettre. 
Je  ne  puis  donc  rien  faire.  Jai  été  à  la  Bibliothèque 


PHILOSOPHIE. 

N^   IL 

Jy  ai  trouvé  des  livres  mais  ils  m'ont  offert  la  même 
difficulté,  il  me  faudrait  absolument  toutes  les  Lettres 
de  1  alphabet  de  cette  langue  imprimé  a  distance. 

Les  unes  des  autres  pour  pouvoir  reconnaitre  la 
forme  de  chaque  sans  cela  je  ne  puis  absolument  rien 
faire.  Jai  cherché  un  livre  de  ce  Genre  et  je  n'en  ai  pas 
trouvé  cependant  il  doit  y  en  avoir  pour  apprendre  à 
lire  aux  enffaits;  a  1  Imprimerie  Royale,  ils  ont  bien 
de  ces  caractères,  mais  ils  ne  sont  point  complets  et  je 
n'en  serais  pas  plus  avancé.  Je  crois  que  Vous  aurez  bien 
de  la  peine  a  exécuter  cette  entrepasse  cependant 
tacher  de  Vous  procurer  le  livre  que  je  demande  ou  je 
ne  vois  pas  de  moyen  de  pouvoir  rien  faire  cependant 
je  pense  qu'a  défaut  de  ce  livre  Ion  pourrait  faire  Gra- 
ver par  un  Graveur  en  taille  douce  et  sous  la  conduite 
dun  homme  qui  connaîtrait  cette  lanque  toutes  les  let- 
tres de  1  alphabet  en  les  isolant  toutes  les  unes  des 
autres  ainsi  que  abcdefgh  tandis  que  nos  lettres 
employées  dans  un  mot  se  liant  les  unes  aux  autres 

PHILOSOPHIE    ITALIQUE, 

celui  qui  ne  les  connaît  pas  séparément  ne  peut  les 
distinguer  ou  devrait  aussi  graver  la  forme  de  chaque 
signe  de  cliaque  accent e  et  des  lettres  capitales.  Si  le 
caractère  on  employé,  ainsi  que  les  nôtres  on  devrait 
marquer  séparément  les  lettres  qui  sont  susceptibles 
de  porter  des  accents  afin  quen  gravant  le  poinçon 
on  le  dispose  pour  recevoir  les  accents. 


t444.  i44i. 


PHILOSOPHIE. 
r.   III. 

On  devrait  graver  cet  exemple  aussi  grande  que  possible 
pour  pouvoir  plus  facilement  en  reconnâitre  et  étudier 
les  formes  ce  travail  préparatoire  pour  être  bien  fait  de- 
mande d'être  exe'cute'  et  surveille'  par  quelqu'un  intelli- 
gent il  deviendra  chère  cependant.  Il  n'y  a  pas  de  moyen 
de  réussir  sans  cela  on  devra  bien  distinguer  les  lettres 
longues  d  avec  les  courtes  en  gravant  ces  lettres  entre 
quatre  Rayes,  c'est  le  seul  moyen  de  réussir  à  graver  le 
caractère  que  Vous  demandez  autrement  je  ne  crois  pas 
que  l'on  puisse  en  venir  a  bout  comme  Vous  me  dites 
que  Vous  avez  déjà  des  matrices  de  ce  caractère  que  Vous 
avez  acbete'es  d'un  anglais.  Vous  pourriez  marquer  sur 
ce  tableau  alphabétique  toutes  les  sortes  que  Vous  avez 
déjà  et  Ion  n'en  graverait  pas  les  poinçons  ce  serait  une 
dépense  de  mains  en  remettant  des  lettres  fondues  sur  les 
longues  et  sur  les  courtes  Ion  pourrait  faire  les  autres 
conformes  comme  ayant  je  suppose  un  m  et  un  b  je 

PHILOSOPHIE    ITALIQUE, 

puis  facilement  faire  le  d  si  ce  poinçon  me  mancjue. 
Voyez  Monsieur  si  jentends  bien  ce  cjue  Fous  me  de- 
mandez et  faites  moi  connaître  Vos  intentions.  Je 
m^j  conformerai.  Vous  me  demandez  aussi  dans  Votre 
lettre  si  Vous  ne  feriez  pas  bien  d'ai^oir  les  doubles 
frappes  des  caractères  (jue  Vous  avez  déjà.  Je  crois 
(jue  ce  serait  une  dépense  inutile  et  (ju'^il  Vous  est  plus 


^"■^  3GG.  i4^ 


PHILOSOPHIE. 

W.    IV. 

Je  crois  que  ce  serait  une  depence  inutile  et  qu'il 
Vous  est  plus  avantageux  d'avoir  de  nouvelles  frap- 
pes car  Vous  serez  toujours  à  même  de  faire  re- 
frapper une  matrice  qui  viendrait  à  se  gâter  et  la 
dépense  en  sera  bien  peu  de  chose  et  par  l'autre 
moyen  Vous  aurez  un  caractère  de  plus. 

Jattendrai  sur  toutes  ces  observations  Votre  déci- 
sion et  je  tacherai  de  justifier  Votre  confiance  si  je 
me  charge  de  Graver  ce  caractère  je  suis  très  sen- 
sible aussi  aux  choses  obligeantes  que  Vous  me  dites 
relativement  à  l'établissement  de  Bruxelles. 

Jai  1  honneur  d  être  bien  sincèrement 


Monsieur 


Votre  affectionné  serviteur 
GANDO. 


PHILOSOPHIE    ITALIQUE, 

Pinard,  qui  s^ était  distingué  à  Bordeaux  comme 
imprimeur ,  graveur  et  fondeur  en  caractères ,  et  qui 
s^  était  formé  à  F  école  de  Firtnin  Didot ,  transporte 
son  établissement  à  Paris.  L'édition  du  Temple  de 
Guide  commencée  par  lui  à  Bordeaux ,  peut  se 
placer  à  côté  des  chefs  d'' oeuvre  de  la  typographie 
française. 


i\"^  358.  35c 


GIGÉRO    ROMAIN. 
N^    VIII. 

Waarde  Medeburger 

Hebbe  de  Eere  UWE  door  dese  te  berigten  dat 
ik  aan  UW  adres  van  hier  afgesonden  heb  den  2  5 
Sej)^  laastleden  een  kistje  waar  in  294  pièces  Ma- 
trysen,  Caractères  philosophe  die  ik  hoope  dat  op 
zyn  tyd  en  in  goede  ordre  by  UW  mogen  arriver  en. 

Aile  de  Matrysen  zyn  seer  diep  van  Contrepoin- 
cons  hope  die  naar  UW  genoegen  mogen  zyn  en 
daar  in  aan  UW  begeerte  voldaan  te  liebben,  my 
verders  aan  UW  gunstig  aandenken  aanbevelende 
kimnende  UE  versekeren  van  altoos  den  zelve  op- 
lettenlieyd  te  gebruyken  en  al  aantewenden  w^at 
doenlyk  zal  zyn  tôt  meerdere  volmaking  van  myne 
Caractères. 

CICÉRO    ITALIQUE. 

Het  montant  der  aan  UE  gesondene  2^4  Ma- 
trysen a  35  Str  hollds  per  stuk  en  1  o  St^^  voor 
het  ajuster  en  bedraagt  te  zaïnen  f  66 1  ,,1  o ,, — 
hollands,  zal  de  vryheyd  nenien  den  Somme  per 
wissel  op  UE  te  trekken  versoeke  UE  desehe  met 
betaleng  geheve  te  honoreren. 


N°s.  4«.  4^3. 


CIGERO    ROMAIN. 

N°.    IX. 

Het  gerugt  is  hier  algemeen  dat  men  voornemens 
is  in  holland  papiere  geld  of  Assignaten  te  maken 
gangbaar  in  de  7  provincien,  indien  aan  dit  gerucht 
eenigte  ^\  aarheyd  is  bied  ik  UE  my  hier  van  enige 
narigten  te  geven,  ik  recomondeere  my  aan  UE 
^\\\  tôt  de  uytvoering  der  Gai^ctei  es  mogelyk  van 
enige  nuttigheyd  zouwde  kunnen  z)ti,  en  my  flat- 
tere  de  vereiste  kennis  te  besitten  die  nodig  is  tôt 
de  uytvoering  van  een  diergelyke  onderneming, 
ter  anderen  door  rrendschap  geheerd  z^nde  aan 
een  bekwaame  konst  gi-aveerder  die  aile  de  rereiste 
bekwaamhedens  besit  in  't  teken  en  graveren  der 
nodege  figm^en  en  verdi-e  nodege  bwerken , 
hoUander  van  geboorten  en  ylugteling  sedert  de 
revolutie  van  87  voor  \\  iens  Eerlyke  denk^^yse  ge- 
noezame  getuygen  gevonden  kunen  ^verden  beyde 

CICÉRO    ITALIQUE. 

te  zameyi  werkende  in  staad  zulleyi  zyn  om  al  wat 
tôt  een  deergelyken  onderneming  vereyst  werd  te 
Executeren. 

Na  mezame  groete  hehhe  de  Eere  te  zyn 

UED^  Dienst  T^aerdige  JMedehurger 
A.  BESSEJIER. 
Paris  den  2  Oct^h^  ^73^- 


16.  4i- 


PETIT  CANON 

N°.  II. 

Gando,  Graveur  et 
Fondeur  en  Caractè- 
res d'Imprimerie,  rue 
des  Maçons-Sorbon- 
ne  N°  21,  a  l'honneur 
de  prévenir  messieurs 

ITALIQ  UE. 

Il  tient  aussi  un 
Magasin  de  Presses 
d'Imprimerie,  neu- 


NOS.  5,8^  5, 


FLEURONS  ET  VIGNETTES. 


1608/09 
1628 


Corps 


^  64o    ^HH^^^^H^^^  m  ^^^H^HH 


l659 


1671/72 


1693 
1713/14 


1755/56 


16 


1764/65 


16 


1781/82  ^ 


788 


18 


N°. 


Corps 


i8o2/o3 


1808 


1809/10 


1820/21 


1822/23 


1828/29 


18 


i838 


18G9/70 


2488 


Les  11'".    i8ii,    1829  sont   de  date  récente. 


N°. 


1^25/26 


28 


.933/34     ^^^ 


28 


i 935/36 


28 


19^9 


1950/51 


%,^^^J/    A 


28 


ig52/53 


28 


2499 


©:k;<35ïs:k;.©j 


N°. 


i/o3 


Corps 


44 


t/o5 


44 


2006 


44 


2008/og 


44 


44 


EPREUVES 

DES    CARACTÈRES 

DE    LA    FONDERIE 

DE  TH.  S.   GANDO, 

FONDEUR  A  BRUXELLES. 


PREMIER     RECUEIL. 


ROMAINS  ET  ITALIQUES. 


I 


NOMPAREILLE. 
NO.    IV. 

n  n'est  point  d'homme  bien  organisé  à  qui  ce  nom  ne  rappelle  quelqu'une  de  ces  belles 
nuits  de  printemps  où,  le  ciel  étan*  serein,  l'air  calme,  toute  la  nature  en  silence",  et, 
pour  ainsi  dire ,  attentive ,  il  a  écouté  avec  ravissement  le  ramage  de  ce  chantre  des  fo- 
rêts. On  pourrait  citer  quelques  autres  oiseaux  chanteurs ,  dont  la  voix  le  dispute ,  à  cer- 
tains égards ,  à  celle  du  rossignol  :  les  alouettes ,  le  serin ,  le  pinson ,  les  fauvettes ,  la 
linotte ,  le  chardonneret ,  le  merle  commun ,  le  merle  solitaire ,  le  moqueur  d'Amérique , 
se  font  écouter  avec  plaisir ,  lorsque  le  rossignol  se  tait  :  les  uns  ont  d'aussi  beaux  sons , 
les  autres  ont  le  timbre  aussi  pur  et  plus  doux ,  d'autres  ont  des  tours  de  gosier  aussi 
flatteurs  ;  mais  il  n'en  est  pas  un  seul  que  le  rossignol  n'efface  par  la  réunion  complète 
de  ces  talents  divers ,  et  par  la  prodigieuse  variété  de  son  ramage  ;  en  soite  que  la  chanson 
de  chacun  de  ces  oiseaux ,  prise  dans  toute  son  étendue ,  n'est  qu'un  couplet  de  celle  du 
rossignol. 

N  O  MPAREI LLE    ITALIQUE. 

Le  rossignol  charme  toujours ,  et  ne  se  répète  jamais ,  du  moins  jamais  servilement;  s'il 
redit  quelque  passage ,  ce  passage  est  animé  d'un  accent  nouveau ,  embelli  par  de  nouveaux 
agréments.  Il  réussit  dans  tous  les  genres ,  il  rend  toutes  les  expressions ,  il  saisit  tous  les 
caractères ,  et  de  plus  il  sait  en  augmenter  l'effet  par  les  contrastes.  Ce  coryphée  du  prin- 
temps se  prépare-t~il  à  chanter  l'hymne  de  la  nature ,  il  commence  par  un  prélude  tim,ide , 
par  des  tons  faibles,  presque  indécis ,  com/me  s'il  voulait  essayer  son  instrument  et  intéresser 
ceux  qui  l'écoutent. 


PETIT     TEXTE. 
N°.    V. 

C'est  dans  ces  tons  passionnés  que  l'on  reconnaît  le  langage  du  sentiment 
qu'un  époux  heureux  adresse  à  une  compagne  chérie  et  qu'elle  seule  peut  lui 
inspirer;  tandis  que  dans  d'autres  phrases  plus  étonnantes  peut-être,  mais 
moins  expressives,  on  reconnaît  le  simple  projet  de  l'amuser  et  de  lui  plaire, 
ou  bien  de  disputer  devant  elle  le  prix  du  chant  à  des  rivaux  jaloux  de  sa 
gloire  et  de  son  bonheur.  Ces  différentes  phrases  sont  entremêlées  de  silences, 
de  ces  silences  qui ,  dans  tout  genre  de  mélodie ,  concourent  si  puissamment 
aux  grands  effets.  On  jouit  des  beaux  sons  que  l'on  vient  d'entendre ,  et  qui 
retentissent  encore  dans  l'oreille:  on  en  jouit  mieux,  parce  que  la  jouissance 
est  plus  intime,  plus  recueillie,  et  n'est  point  troublée  par  des  sensations 

PETIT     TEXTE    F  TA  LI  QUE. 

nouvelles:  bientôt  on  attend,  on  désire  une  autre  reprise;  oîi  espère  que 
ce  sera  celle  gui  plaît:  si  Von  est  trompé,  la  beauté  du  morceau  que  Von 
entend  ne  permet  pas  de  regretter  celui  qui  n'est  que  différé,  et  Von 
conserve  V intérêt  de  Vespérance  pour  les  reprises  qui  suivroiit. 


iiG. 


i8G.  187. 


PETIT     TEXTE. 

N^    VI. 

LES  CÀTÀC03IBES  DE  ROME. 

Sous  les  remparts  de  Rome  et  sous  ces  vastes  plaines , 
Sont  des  antres  profonds ,  des  voûtes  souterraines , 
Qui ,  pendant  deux  mille  ans ,  creusés  par  les  humains , 
Donnèrent  leurs  rochers  aux  palais  des  Romains  ; 
Avec  ses  monuments  et  sa  magnificence, 
Rome  entière  sortit  de  cet  abîme  immense. 
Depuis,  loin  des  regards  et  du  fer  des  tyrans, 
L'Église ,  encor  naissante ,  y  cacha  ses  enfants , 
Jusqu'au  jour  où,  du  sein  de  cette  nuit  profonde, 
Triomphante ,  elle  vint  doimer  des  lois  au  monde , 
Et  marqua  de  sa  croix  les  drapeaiix  des  Césars. 

Jaloux  de  tout  connaître,  un  jeune  amant  des  arts, 

L'amour  de  ses  parents ,  l'espoir  de  la  peinture , 

Brûlait  de  visiter  cette  demeure  obscure, 

De  notre  antique  foi  vénérable  berceau. 

Un  fil  dans  une  main ,  et  dans  l'autre  un  flambeau , 

Il  entre,  il  se  confie  à  ces  voûtes  nombreuses 

Qui  croisent  en  tous  sens  leurs  routes  ténébreuses; 

Il  aime  à  voir  ce  lieu,  sa  triste  majesté, 

Ce  palais  de  la  nuit ,  cette  sombre  cité , 

Ces  temples  où  le  Christ  vit  ses  premiers  fidèles , 

Et  de  ces  grands  tombeaux  les  ombres  étemelles. 

Dans  un  coin  écarté  se  présente  un  réduit , 

Mytérieux  asile  où  l'espoir  le  conduit; 

Il  voit  des  vases  saints  et  des  urnes  pieuses , 

Des  vierges ,  des  martyrs ,  dépouilles  précieuses. 

Il  saisit  ce  trésor ,  il  veut  poursuivre  :  hélas  ! 

Il  a  perdu  le  fil  qui  conduisait  ses  pas. 

Il  cherche ,  mais  en  vain  :  il  s'égare ,  il  se  trouble , 

Il  s'éloigne ,  il  revient ,  et  sa  crainte  redouble  ; 

Il  prend  tous  les  chemins  que  lui  montre  la  peur. 


N».  i84. 


PETIT     TEXTE. 
N«.    VII. 

On  s'embarque  sur  la  Brenta  pour  arriver  à  Venise,  et  des  deux  cô- 
tés du  canal  on  voit  les  palais  des  Vénitiens ,  grands  et  un  peu  délabrés , 
comme  la  magnificence  italienne.  Ils  sont  ornés  d'une  manière  bizarre  et 
qui  ne  rappelle  en  rien  le  goût  antique.  L'architecture  vénitienne  se 
ressent  du  commerce  avec  l'Orient;  c'est  un  mélange  du  goût  mauresque 
et  gothique  qui  attire  la  curiosité  sans  plaire  à  l'imagination.  Le  peup- 
lier, cet  arbre  régulier  comme  l'architecture,  borde  le  canal  presque 
partout.  Le  ciel  est  d'un  bleu  vif  qui  contraste  avec  le  vert  éclatant  de 
la  campagne  ;  ce  vert  est  entretenu  par  l'abondance  excessive  des  eaux  : 
le  ciel  et  la  terre  sont  ainsi  de  deux  couleurs  si  fortement  tranchées, 
que  cette  nature  elle-même  a  l'air  d'être  arrangée  avec  une  sorte  d'ap- 
prêt; et  l'on  n'y  trouve  point  le  vague  mystérieux  qui  fait  aimer  le  midi 
de  l'Italie.  L'aspect  de  Venise  est  plus  étonnant  qu'agréable  :  on  croit 
d'abord  voir  une  ville  submergée ,  et  la  réflexion  est  nécessaire  pour  ad- 
mirer le  génie  des  mortels  qui  ont  conquis  cette  demeure  sur  les  eaux. 
Naples  est  bâtie  en  amphithéâtre  au  bord  de  la  mer;  mais  Venise  étant 
sur  un  terrain  tout- à -fait  plat,  les  clochers  ressemblent  aux  mâts  d'un 
vaisseau  qui  resterait  immobile  au  milieu  des  ondes.  Un  sentiment  de 
tristesse  s'empare  de  l'imagination  en  entrant  dans  Venise.  On  prend 
congé  de  la  végétation:  on  ne  voit  pas  même  une  mouche  en  ce  séjour; 
tous  les  animaux  en  sont  bannis,  et  l'homme  seul  est  là  pour  lutter 
contre  la  mer. 

Le  silence  est  profond  dans  cette  ville ,  dont  les  rues  sont  des  canaux, 
et  le  bruit  des  rames  est  l'unique  interruption  à  ce  silence. 

PETIT     TEXTE    ITALIQUE. 

Ce  n'est  pas  la  campagne,  puisqu'on  n'y  voit  pas  un  arbre;  ce  n'est 
pas  la  ville,  puisqu'on  n'y  entend  pas  le  moindre  mouvement  ;  ce  n'est 
pas  même  un  vaisseau,  puisqu'on  n'avance  pas  :  c'est  une  demeure  doiit 
l'orage  fait  une  prison;  car  il  y  a  des  moments  où  l'o?i  ?ie  peut  sortir 
ni  de  la  ville  ni  de  chez  soi.  On  trouve  des  hommes  du  peuple  à  Venise 
qui  n'ont  jamais  été  d'un  quartier  à  l'autre,  qui  n'ont  pas  vu  la  place 
Saint-Marc ,  et  pour  qui  la  vue  d'un  cheval  ou  d'un  arbre  serait  vue 
véritable  merveille. 


NOS.  ,88.   189. 


PETIT     TEXTE. 

On  a  remarqué,  avec  raison,  que  les  règnes  d'Auguste  et  de  Louis  XIV 
se  ressemblaient  par  le  concours  des  grands  hommes  de  tous  les  genres 
qui  ont  illustré  leurs  règnes.  Mais  on  ne  doit  pas  croire  que  ce  soit  l'effet 
seul  du  hasard;  et  si  ces  deux  règnes  ont  de  grands  rapports,  c'est  qu'ils 
ont  été  accompagnés  à  peu  près  des  mêmes  circonstances.  Ces  deux  prin- 
ces sortaient  des  guerres  civiles ,  de  ce  temps  où  les  peuples  armés ,  nour- 
ris sans  cesse  au  milieu  des  périls,  entêtés  des  plus  hardis  desseins,  ne 
voient  rien  où  ils  ne  puissent  atteindre;  de  ce  temps  où  les  événements 
heureux  et  malheureux ,  mille  fois  répétés ,  étendent  les  idées ,  fortifient 
l'âme  à  force  d'épreuves,  augmentent  son  ressort,  et  lui  donnent  ce  désir 
de  gloire  qui  ne  manque  jamais  de  produire  de  grandes  choses. 

Voilà  comme  Auguste  et  Louis  XIV  trouvèrent  le  monde.  César  s'en 
était  rendu  le  maître,  et  avait  devancé  Auguste;  Henri  IV  avait  conquis 
son  propre  royaume,  et  fut  l'aïeul  de  Louis  XIV.  Même  fermentation  dans 
les  esprits  ;  les  peuples ,  de  part  et  d'autre ,  n'avaient  été  pour  la  plupart 
que  des  soldats,  et  les  capitaines,  des  héros.  A  tant  d'agitation,  à  tant 
de  troubles  intestins ,  succède  le  calme  que  produit  l'autorité  réunie.  Les 
prétentions  des  républicains  et  les  folles  entreprises  des  séditieux  dé- 
truites laissent  le  pouvoir  entre  les  mains  d'un  seul  ;  et  ces  deux  princes, 
devenus  les  maîtres  (quoiqu'à  des  titres  bien  difféi-ents),  n'ont  plus  à 
s'occuper  qu'à  rendre  utile  à  leurs  états  cette  même  chaleur  qui  jusqu'alors 
n'avait  servi  qu'au  malheur  public.  Leur  génie  et  leur  cai-actère  particu- 
lier se  ressemblaient  encore  par  là ,  ainsi  que  leurs  siècles. 

L'ambition  et  l'ardeur  de  la  gloire  avaient  été  égales  entre  eux  :  héros 
sans  être  téméraires,  entreprenants  sans  être  aventuriers,  tous  deux  avaient 

PETIT    TEXTE    ITALIQUE. 

été  exposés  aux  orages  de  la  guerre  civile,  tous  deux  avaient  commandé 
leurs  armées  en  personne,  l'un  et  l'autre  avaient  su  vaincre  et  pardonner. 
La  paix  les  trouva  encore  semblables  par  un  certain  air  de  grandeur, 
par  leur  magnificence  et  leur  libéralité.  Chacun  d'eux  possédait  ce  goût 
naturel,  cet  instinct  heureux  qui  sert  à  démêler  les  hommes.  Leurs  mi- 
nistres pensaient  comme  eux,  et  Mécène  protégeait  auprès  (TAuguste, 
ainsi  que  Colbert  auprès  de  Louis  XIV,  tout  ce  que  Rome  et  la  France 
avaient  de  génies  distingués.  Enfin,  le  hasard  les  ayant  fait  naitt^e  l'un 
et  Vautre  dans  le  même  mois,  tous  deux  moururent  presque  au  même  âge. 


N"*.   182.   i83.     Gravé  par  Istastoule.  Cet  assortiment  ne  se  trouve  pas  dans  le  spécimen 
de  Gando. 


GAILLARDE. 

N''.    IIL 

On  ne  fut  pas  long-temps  sans  voir  l'armée  des  Turcs  et  des  Tar- 
tares  qui  venaient  attaquer  le  petit  retranchement  avec  dix  pièces  de 
canon  et  deux  mortiers.  Les  queues  de  cheval  flottaient  en  l'air,  les 
clairons  sonnaient,  les  cris  de  Allah  Allah  se  faisaient  entendre  de 
tous  côtés.  Le  baron  de  Grothusen  remarqua  que  les  Turcs  ne  mêlaient 
dans  leurs  cris  aucune  injure  contre  le  roi,  et  qu'ils  l'appelaient  seu- 
lement Demirbash  (tête  de  fer).  Aussitôt  il  prend  le  parti  de  sortir 
seul ,  sans  armes ,  des  retranchements  ;  il  s'avança  dans  les  rangs  des 
janissaires,  qui  presque  tous  avaient  reçu  de  l'argent  de  lui.  «  Eh 
quoi!  mes  amis,  leur  dit-il  en  propres  mots,  venez-vous  massacrer 
trois  cents  Suédois  sans  défense,  vous,  braves  janissaires,  qui  avez 
pardonné  à  cent  mille  Russes,  quand  ils  vous  ont  crié  amman  (pardon)? 
Avez-vous  oublié  les  bienfaits  que  aous  avez  reçus  de  nous?  et  voulez- 
vous  assassiner  ce  grand  roi  de  Suède  que  vous  aimez  tant,  et  qui  vous 
a  fait  tant  de  libéralités?  Mes  amis,  il  ne  demande  que  trois  jours,  et 
les  ordres  du  sultan  ne  sont  pas  si  sévères  qu'on  vous  le  fait  croire.  » 

Ces  paroles  firent  un  effet  que  Grothusen  n'attendait  pas  lui-même. 
Les  janissaires  jurèrent  sur  leurs  barbes  qu'ils  n'attaqueraient  pas  le 
roi,  et  qu'ils  lui  donneraient  les  trois  jours  qu'il  demandait.  En  vain 
on  donna  le  signal  de  l'assaut.  Lesjanissaires,  loin  d'obéir,  menacèrent 
de  se  jeter  sur  leurs  chefs,  si  l'on  n'accordait  pas  trois  jours  au  roi  de 
Suède:  ils  vinrent  en  tumulte  à  la  tente  du  pacha  de  Bender,  criant 
que  les  ordres  du  sultan  étaient  supposés.  A  cette  sédition  inopinée 
le  pacha  n'eut  à  opposer  que  la  patience. 

GAILLARDE    ITALIQUE. 

Il  feignit  d'être  content  de  la  généreuse  résolution  des  janissaires, 
et  leur  ordonna  de  se  retirer  à  Bender.  Le  khan  des  Tartares,  homme 
violent,  voulait  donner  immédiatement  l'assaut  avec  ses  troupes;  mais 
le  pacha,  qui  ne  prétendait  pas  que  les  Tartares  eussent  seuls  l'hon- 
neur de  prendre  le  roi,  tandis  qu'il  serait  puni  peut-être  de  la  déso- 
béissance de  ses  janissaires ,  persuada  au  khan  d'attendre  jusqu'au 
lendemain.  Le  pacha,  de  retour  à  Bender,  assembla  tous  les  officiers 
des  janissaires  et  les  plus  vieux  soldats;  il  leur  lut  et  leur  fit  voir 


N"^  2:<-2.  -i.n. 


GAILLARDE. 

r.    IV. 

PHILOSOPHIE  DE  NEWTON. 

Le  charme  tout-puissant  de  la  philosophie 

Elève  un  esprit  sage  au-dessus  de  l'envie. 

Tranquille  au  haut  des  cieux,  que  Newton  s'est  soumis, 

Il  ignore  en  effet  s'il  a  des  ennemis. 

Je  ne  les  entends  plus.  Déjà  de  la  carrière 

L'auguste  vérité  vient  ouvrir  la  barrière; 

Déjà  ces  tourbillons,  l'un  par  l'autre  pressés. 

Se  mouvant  sans  espace ,  et  sans  règle  entassés , 

Ces  fantômes  savants  à  mes  yeux  disparaissent; 

Un  jour  plus  pur  me  luit:  les  mouvements  renaissent. 

L'espace,  qui  de  Dieu  contient  l'immensité. 

Voit  rouler  dans  son  sein  l'univers  limité, 

Cet  univers  si  vaste  à  notre  faible  vue , 

Et  qui  n'est  qu'un  atome,  un  point  dans  l'étendue. 

Dieu  parle ,  et  le  chaos  se  dissipe  à  sa  voix  ; 

Vers  un  centre  commun  tout  gravite  à  la  fois. 

Ce  ressort  si  puissant,  l'âme  de  la  nature. 

Etait  enseveli  dans  une  nuit  obscure; 

Le  compas  de  Newton,  mesurant  l'univers, 

Lève  enfin  ce  grand  voile ,  et  les  cieux  sont  ouverts 

Il  découvre  à  mes  yeux ,  par  une  main  savante , 

De  l'astre  des  saisons  la  robe  étincelante: 

L'émeraude,  l'azur,  le  pourpre,  le  rubis, 

Sont  l'immortel  tissu  dont  brillent  ses  habits. 

Chacun  de  ses  rayons,  dans  sa  substance  pure. 

Porte  en  soi  la  couleur  dont  se  peint  la  nature , 

Et,  confondus  ensemble,  ils  éclairent  nos  yeux. 

Ils  animent  le  monde ,  ils  empHssent  les  cieux. 

Confidents  du  Très-Haut,  substances  éterneUes, 

Qui  brûlez  de  ses  feux ,  qui  couvrez  de  vos  ailes 

Le  trône  où  votre  maître  est  assis  parmi  vous. 

Parlez:  du  grand  Newton  n'étiez-vous  pas  jaloux? 


N».  234. 


GAILLARDE. 

N«.    V. 

Vous  ignorez,  monsieur,  que  vous  écrivez  à  un  pauvre  homme  ac- 
cablé de  maux ,  et  de  plus  fort  occupé ,  qui  n'est  guère  en  état  de  vous 
répondre ,  et  qui  le  serait  encore  moins  d'établir  avec  vous  la  société 
que  vous  lui  proposez.  Vous  m'honorez  en  pensant  que  je  pourrais 
vous  y  être  utile ,  et  vous  êtes  louable  du  motif  qui  vous  le  fait  dési- 
rer; mais  sur  le  motif  même,  je  ne  vois  rien  de  moins  nécessaire  que 
de  vous  établir  à  Montmorency  :  vous  n'avez  pas  besoin  d'aller  cher- 
cher si  loin  les  principes  de  la  morale. 

Rentrez  dans  votre  cœur,  et  vous  les  y  trouverez;  et  je  ne  pourrai 
rien  vous  dire  à  ce  sujet  que  ne  vous  dise  encore  mieux  votre  cons- 
cience, quand  vous  la  voudrez  consulter.  La  vertu,  monsieur,  n'est 
pas  une  science  qui  s'apprend  avec  tant  d'appareil  :  pour  être  vertu- 
eux ,  il  suffît  de  vouloir  l'être  ;  et  si  vous  avez  bien  cette  volonté ,  tout 
est  fait;  votre  bonheur  est  décidé. 

S'il  m'appartenait  de  vous  donner  des  conseils,  le  premier  que  je 
voudrais  vous  donner  serait  de  ne  vous  point  livrer  à  ce  goût  que  vous 
dites  avoir  pour  la  vie  contemplative ,  et  qui  n'est  qu'une  paresse  de 
l'âme,  condamnable  à  tout  âge,  et  surtout  au  vôtre.  L'homme  n'est 
point  fait  pour  méditer,  mais  pour  agir.  La  vie  laborieuse  que  Dieu 
nous  impose  n'a  rien  que  de  doux  au  cœur  de  l'homme  de  bien  qui  s'y 
livre  en  vue  de  remplir  son  devoir,  et  la  vigueur  de  la  jeunesse  ne 
vous  a  pas  été  donnée  pour  la  perdre  à  d'oisives  contemplations. 

Travaillez  donc ,  monsieur ,  dans  l'état  où  vous  ont  placé  vos  parents 
et  la  Providence  :  voilà  le  premier  précepte  de  la  vertu  que  vous  voulez 

GAILLARDE    ITALIQUE. 

suivre;  et  si  le  séjour  de  Paris  j  Joint  à  l'emploi  que  vous  remplis- 
sez, vous  parait  d'un  trop  dij^cile  alliage  avec  elle,  faites  mieux , 
monsieur,  retournez  dans  votre  province  ;  allez  vivre  da/tis  le  sein 
de  votre  famille;  servez,  soignez  vos  vertueux  parents  :  c'est  là  que 
vous  remplirez  véritablement  les  soins  que  la  vertu  vous  impose. 

Une  vie  dure  est  plus  facile  à  supporter  en  province  que  la  for- 
tune à  poursuivre  à  Paris,  surtout  quand  on  sait,  comme  vous  ne 
l'ignorez  pas ,  que  les  plus  indignes  manèges  y  font  plus  de  fripons 


No^  23G.  23- 


PETIT     ROMAIN. 

N''.    VII. 

Vous  voulez,  monsieur  le  maréchal,  que  je  vous  décrive 
le  pays  que  j'habite?  Mais  comment  faire?  Je  ne  sais  voir 
qu'autant  que  je  suis  ému;  les  objets  indifférents  sont  nuls 
à  mes  yeux;  je  n'ai  de  l'attention  qu'à  proportion  de  l'inté- 
rêt qui  l'excite,  et  quel  intérêt  puis-je  prendre  à  ce  que  je 
retrouve  si  loin  de  vous?  Des  arbres,  des  rochers,  des  mai- 
sons, des  hommes  même,  sont  autant  d'objets  isolés  dont 
chacun  en  particulier  donne  peu  d'émotion  à  celui  qui  le 
regarde;  mais  l'impression  commune  de  tout  cela,  qui  le 
réunit  en  un  seul  tableau,  dépend  de  l'état  où  nous  som- 
mes en  le  contemplant.  Ce  tableau,  quoique  toujours  le 
même,  se  peint  d'autant  de  manières  qu'il  y  a  de  disposi- 
tions différentes  dans  les  cœurs  des  spectateurs  ;  et  ces  dif- 
férences, qui  font  celles  de  nos  jugements,  n'ont  pas  lieu 
seulement  d'un  spectateur  à  l'autre,  mais  dans  le  même, 
en  différents  temps.  C'est  ce  que  j'éprouve  bien  sensible- 
ment en  revoyant  ce  pays  que  j'ai  tant  aimé.  J'y  croyais 
trouver  ce  qui  m'avait  charmé  dans  ma  jeunesse:  tout  est 
changé;  c'est  un  autre  paysage,  un  autre  air,  un  autre  ciel, 
d'autres  hommes  ;  et  ne  voyant  plus  mes  compagnons  avec 

PETIT    ROMAIN    ITALIQUE. 

des  yeux  de  vingt  ans,  je  les  trouve  beaucoup  vieillis.  On  re- 
grette le  bon  temps  d'autrefois;  je  le  crois  bien:  nous  attri- 
buons aux  choses  tout  le  changement  qui  s'est  fait  en  nous; 
et  lorsque  le  plaisir  nous  quitte,  nous  croyons  qu'il  n'est  plus 
nulle  part.  D'autres  voient  les  choses  comme  nous  les  avons 
vues,  et  les  verront  comme  nous  les  voyons  aujourd'hui.  Mais 
ce  sont  des  descriptions  que  vous  me  demandez ,  non  des  ré- 
flexions; et  les  miennes  m'entraînent  comme  un  vieux  enfant 


N"S.    2()o.    291 


PETIT     ROMAIN. 
r.    VIII. 

LE  VOYAGE  IMAGINAIRE. 

L'automne  accourt,  et  sur  son  aile  humide 
M'apporte  encor  de  nouvelles  douleurs. 
Toujours  souffrant,  toujours  pauvre  et  timide, 
De  ma  gaîté  je  vois  pâlir  les  fleurs. 
Arrachez-moi  des  fanges  de  Lutèce; 
Sous  un  beau  ciel  mes  yeux  devaient  s'ouvrir. 
Tout  jeune  aussi,  je  rêvais  à  la  Grèce, 
C'est  là,  c'est  là  que  je  voudrais  mourir. 

En  vain  faut-il  qu'on  me  traduise  Homère  : 
Oui,  je  fus  Grec;  Pythagore  a  raison. 
Sous  Périclès,  j'eus  Athènes  pour  mère. 
Je  visitai  Socrate  en  sa  prison; 
De  Phidias  j'encensai  les  merveilles; 
De  l'Ilyssus  j'ai  vu  les  bords  fleurir. 
J'ai  sur  l'Himète  éveillé  les  abeilles  : 
C'est  là,  c'est  là  que  je  voudrais  mourir. 

Dieux!  qu'un  seul  jour  éblouissant  ma  vue. 
Ce  beau  soleil  me  réchauffe  le  cœur; 
La  liberté,  que  de  loin  je  salue, 
Me  crie  :  ((  Accours  ;  Thrasybule  est  vainqueur. 
Partons!  partons!  la  barque  est  préparée. 
Mer,  en  ton  sein  garde-moi  de  périr; 
Laisse  ma  muse  aborder  au  Pirée  : 
C'est  là,  c'est  là  que  je  voudrais  mourir. 


N".    2gG. 


PETIT    ROMAIN. 

Un  soir  que  je  m'étais  avancé  jusqu'à  la  Vallée  des  Sé- 
pulcres, je  montai  sur  les  hauteurs  qui  la  bordent,  et  d'où 
l'œil  domine  à  la  fois  l'ensemble  des  ruines  et  l'immensité 
du  désert.  Le  soleil  venait  de  se  coucher;  un  bandeau  rou- 
geâtre  marquait  encore  sa  trace  à  l'horizon  lointain  des  monts 
de  la  Syrie;  la  pleine  lune,  à  l'orient,  s'élevait  sur  un  fond 
bleuâtre,  aux  planes  rives  de  l'Euphrate;  le  ciel  était  pur, 
l'air  calme  et  serein;  l'éclat  mourant  du  jour  tempérait 
l'horreur  des  ténèbres  ;  la  fraîcheur  naissante  de  la  nuit  cal- 
mait les  feux  de  la  terre  embrasée  ;  les  pâtres  avaient  retiré 
leurs  chameaux  ;  l'œil  n'apercevait  plus  aucun  mouvement 
sur  la  terre  monotone  et  grisâtre;  un  vaste  silence  régnait 
sur  le  désert  :  seulement ,  à  de  longs  intervalles ,  on  enten- 
dait les  lugubres  cris  de  quelques  oiseaux  de  nuit  et  de 
quelques  chacals. . .  L'ombre  croissait,  et  déjà  dans  le  cré- 
puscule mes  regards  ne  distinguaient  plus  que  les  fantômes 
blanchâtres  des  colonnes  et  des  murs. . .  Ces  lieux  solitaires, 
cette  soirée  paisible,  cette  scène  majestueuse,  imprimèrent  à 
mon  esprit  un  recueillement  religieux.  L'aspect  d'une  grande 
cité  déserte,  la  mémoire  des  temps  passés,  la  comparaison 
de  l'état  présent,  tout  éleva  mon  cœur  à  de  hautes  pensées. 

PETIT    ROMAIN    ITALIQUE. 

Je  m^ assis  sur  le  tronc  d'une  colonne;  et  là,  le  coude  appuyé 
sur  le  genou,  la  tête  soutenue  sur  la  niain,  tantôt  levant  les 
yeux  au  ciel,  tantôt  les  fixant  sur  les  ruines,  je  m'abandonnai 
à  une  rêverie  profonde.  Ici,  me  dis-je,  ici  fleurit  jadis  une 
ville  opulente;  ici  fut  le  siège  d'un  empire  puissant.  Oui!  ces 
lieux,  maintenant  si  déserts ,  jadis  une  multitude  vivante  ani- 
mait leur  enceinte;  une  foule  active  circulait  dans  ces  routes 


N°*.  2^4.   2-5.     Gravé  par  Istastoule.  Cet  assortiment   ne  se  tronve  pas  dans  le  spécimen 
de  Gando. 


PHILOSOPHIE. 

W.    V. 

L'ORAGE. 

On  voit  à  l'horizon ,  de  deux  points  opposés , 
Des  nuages  monter  dans  les  airs  embrasés  ; 
On  les  voit  s'épaissir ,  s'élever  et  s'étendre. 
D'un  tonnerre  éloigné  le  bruit  s'est  fait  entendre  : 
Les  flots  en  ont  frémi ,  l'air  en  est  ébr2ailé , 
Et  le  long  du  vallon  le  feuillage  a  tremblé  ; 
Les  monts  ont  prolongé  le  lugubre  murmure , 
Dont  le  son  lent  et  sourd  attriste  la  nature. 
Il  succède  à  ce  bruit  un  calme  plein  d'horreur , 
Et  la  terre  en  silence  attend  dans  la  terreur  ; 
Des  monts  et  des  rochers  le  vaste  amphithéâtre 
Disparaît  tout  à  coup  sous  un  voile  grisâtre  ; 
Le  nuage  élargi  le  couvre  de  ses  flancs  ; 
Il  pèse  sur  les  airs  tranquilles  et  brûlants. 
Mais  des  traits  enflammés  ont  sillonné  la  nue , 
Et  la  foudre,  en  grondant,  roule  dans  l'étendue; 
Elle  redouble,  vole,  éclate  dans  les  airs; 
Leur  nuit  est  plus  profonde,  et  de  vastes  éclairs 
En  font  sortir  sans  cesse  un  jour  pâle  et  livide. 
Du  couchant  ténébreux  s'élève  un  vent  rapide , 
Qui  tourne  sur  la  plaine,  et,  rasant  les  sillons. 
Enlève  un  sable  noir,  qui  roule  en  tourbillons. 
Ce  nuage  nouveau,  ce  torrent  de  poussière, 
Dérobe  à  la  campagne  un  reste  de  lumière. 
La  peur,  l'airain  sonnant,  dans  les  temples  sacrés 


N".  3Go. 


PHILOSOPHIE. 

W.    VI. 

De  tous  les  êtres  animés,  Yoici  le  plus  élégant  pour  la 
forme,  et  le  plus  brillant  pour  les  couleurs.  Les  pierres  et 
les  métaux  polis  par  notre  art  ne  sont  pas  comparables  à 
ce  bijou  de  la  nature  ;  elle  l'a  placé,  dans  l'ordre  des  oiseaux, 
au  dernier  degré  de  l'échelle  de  grandeur:  maxime  mi- 
randa  in  minimis.  Son  chef-d'œuvre  est  le  petit  oiseau- 
mouche;  elle  l'a  comblé  de  tous  les  dons  qu'elle  n'a  fait 
que  partager  aux  autres  oiseaux:  légèreté,  rapidité,  pres- 
tesse, grâce  et  riche  parure,  tout  appartient  à  ce  petit  fa- 
vori. L'émeraude,  le  rubis,  la  topaze,  brillent  sur  ses  habits  ; 
il  ne  les  souille  jamais  de  la  poussière  de  la  terre,  et,  dans 
sa  vie  tout  aérienne ,  on  le  voit  à  peine  toucher  le  gazon 
par  instants:  il  est  toujours  en  l'air,  volant  de  fleurs  en 
fleurs  ;  il  a  leur  fraîcheur  comme  il  a  leur  éclat  ;  il  vit  de 
leur  nectar,  et  n'habite  que  les  climats  où  sans  cesse  elles 
se  renouvellent. 

C'est  dans  les  contrées  les  plus  chaudes  du  Nouveau- 
Monde  que  se  trouvent  toutes  les  espèces  d'oiseaux- 
mouches. 

PHILOSOPHIE    ITJLIQUE. 

Elles  sont  assez  nombreuses ^  et  paroissent  confinées 
entre  les  deux  tropiques;  car  ceux  qui  s^ avancent  en  été 
dans  les  zones  tempérées  n'y  font  qu'un  court  séjour; 
ils  semblent  suivre  le  soleil,  s'avancer,  se  retirer  avec 
lui,  et  voler  sur  l'aile  des  zéphyrs  à  la  suite  d'un  prin- 
temps éternel. 


NOS.  356_  3; 


PHILOSOPHIE. 

r.    VIL 

FANTOMES. 

I. 

Hélas!  que  j'en  ai  vu  mourir  déjeunes  filles! 
C'est  le  destin  :  il  faut  une  proie  au  trépas  ; 
Il  faut  que  Fherbe  tombe  au  tranchant  des  faucilles  ; 
Il  faut  que  dans  le  bal  les  folâtres  quadrilles 
Foulent  des  roses  sous  leurs  pas. 

Il  faut  que  l'eau  s'épuise  à  courir  les  vallées  ; 
Il  faut  que  l'éclair  brille ,  et  brille  peu  d'instants  ; 
Il  faut  qu'avril  jaloux  brûle  de  ses  gelées 
Le  beau  pommier,  trop  fier  de  ses  fleurs  étoilées, 
Neige  odorante  du  printemps. 

Oui,  c'est  la  vie;  après  le  jour,  la  nuit  livide. 
Après  tout,  le  réveil  infernal  ou  divin. 
Autour  du  grand  banquet  siège  une  foule  avide  ; 
Mais  bien  des  conviés  laissent  leur  place  vide , 
Et  se  lèvent  avant  la  fm. 

IL 

Que  j'en  ai  vu  mourir!  —  L'une  était  rose  et  blanche; 
L'autre  semblait  ouïr  de  célestes  accords; 
L'autre,  faible,  appuyait  d'un  bras  son  front  qui  penche, 
Et,  comme  en  s'envolant  l'oiseau  courbe  la  branche, 
Son  âme  avait  brisé  son  corps! 


X".  MVi. 


PHILOSOPHIE. 

Si  Tempire  appartenoit  à  la  beauté  et  non  à  la  force, 
le  paon  seroit,  sans  contredit,  le  roi  des  oiseaux;  il  n'en 
est  point  sur  qui  la  nature  ait  versé  ses  trésors  avec  plus 
de  profusion  :  la  taille  grande ,  le  port  imposant ,  la  dé- 
marche fière ,  la  figure  noble ,  les  proportions  du  corps 
élégantes  et  sveltes,  tout  ce  qui  annonce  un  être  de  dis- 
tinction lui  a  été  doimé.  Une  aigrette  mobile  et  légère, 
peinte  des  plus  riches  couleurs,  orne  sa  tête  et  l'élève 
sans  la  charger  :  son  incomparable  plumage  semble  réu- 
nir tout  ce  qui  flatte  nos  yeux  dans  le  coloris  tendre  et 
frais  des  plus  belles  fleurs ,  tout  ce  qui  les  éblouit  dans 
les  reflets  pétillants  des  pierreries ,  tout  ce  qui  les  étonne 
daiis  l'éclat  majestueux  de  l'arc-en-ciel  ;  non-seulement 
la  nature  a  réuni  sur  le  plumage  du  paon  toutes  les  cou- 
leurs du  ciel  et  de  la  terre  pour  en  faire  le  chef-d'œuvre 
de  sa  magnificence,  elle  les  a  encore  mêlées,  assorties, 
nuancées,  fondues  de  son  inimitable  pinceau,  et  en  a 
fait  un  tableau  unique,  où  elles  tirent  de  leur  mélange 

PHILOSOPHIE    ITALIQUE. 

avec  des  numices plus  sojubreSj  et  de  leurs  oppositions 
entre  elles ,  un  nouveau  lustre  et  des  effets  de  lumière 
si  sublimes  que  notre  art  ne  peut  ni  les  imiter  ni  les 
décrire. 

Tel  par  oit  à  nos  yeux  le  plu7nage  du  paon,  loi^s- 
quHl  se  promène  paisible  et  seul,  dans  un  beau  jour 
de  printemps;  mais  si  sa  femelle,  vient  tout  à  coup  à 


^     .  Sao.  3ji.     Gravé  par  Istastoule.   Cet  assortiment   ne  se  trouve  jjas  dans  le  spécimen 
de  Gandu. 


CICÉRO    ROMAIN. 

Le  triste  hiver,  saison  de  mort,  est  le  temps  du 
sommeil ,  ou  plutôt  de  la  torpeur  de  la  nature  :  les 
insectes  sans  vie ,  les  reptiles  sans  mouvement ,  les 
végétaux  sans  verdure  et  sans  accroissement,  tous 
les  habitants  de  l'air  détruits  ou  relégués,  ceux  des 
eaux  renfermés  dans  des  prisons  de  glace,  et  la 
plupart  des  animaux  terrestres  confinés  dans  les 
cavernes,  les  antres  et  les  terriers,  tout  nous  pré- 
sente les  images  de  la  langueur  et  de  la  dépopula- 
tion. Mais  le  retour  des  oiseaux  au  printemps  est  le 
premier  signal  et  la  douce  annonce  du  réveil  de  la 
nature  vivante  ;  et  les  feuillages  renaissants ,  et  les 
bocages  revêtus  de  leur  nouvelle  parure,  semble- 
roient  moins  frais  et  moins  touchants  sans  les  nou- 
veaux hôtes  qui  viennent  les  animer. 

CICERO    ITALIQUE. 

De  ces  hôtes  des  bois,  les  fauvettes  sont  les  plus 
nombreuses,  comme  les  plus  aimables:  vives,  agiles, 
légères,  et  sans  cesse  remuées,  tous  leurs  mouve- 
ments ont  Vair  du  sentiment,  et  tous  leurs  accents 
le  ton  de  la  joie.  Ces  jolis  oiseaux  arrivent  au  mo- 
ment où  les  arbres  développent  leurs  feuilles  et 


N"\   4io.   4 II.      Gnivé   j)ai-   Islasloule.   Gel  assorlliiieiil    m-   .se   11 
de  Gaiido. 


ilans  K-  .sp, 


CICERO    ROMAIN. 
A. 

LE  SOIR. 

Le  soir  ramène  le  silence. 
Assis  sur  ces  rochers  déserts , 
Je  suis  dans  le  vague  des  aiis 
Le  char  de  la  nuit  qui  s'avance. 

Vénus  se  lève  à  l'horizon; 
A  mes  pieds  l'étoile  amoureuse 
De  sa  lueur  mystérieuse 
Blanchit  les  tapis  de  gazon. 

De  ce  hêtre  au  feuillage  sombre 
J'entends  frissonner  les  rameaux: 
On  dirait  autour  des  tombeaux 
Qu'on  entend  voltiger  une  ombre. 

Tout  à  coup ,  détaché  des  cieux , 
Un  rayon  de  l'astre  noctm^ne, 
Glissant  sur  mon  front  taciturne , 
Vient  mollement  toucher  mes  yeux. 

Doux  reflet  d'un  globe  de  flamme. 
Charmant  rayon,  que  me  veux-tu? 
Viens-tu  dans  mon  sein  abattu 
Porter  la  lumière  à  mon  âme? 


N«.  ïSGg. 


CICÉRO    ROMAIN. 
B. 

LA  PROVIDENCE. 

Combien  l'homme  est  infortuné  ! 
Le  sort  maîtrise  sa  faiblesse, 
Et  de  l'enfance  à  la  vieillesse, 
D'écueils  il  marche  environné; 
Le  temps  l'entraîne  avec  vitesse; 
Il  est  mécontent  du  passé; 
Le  présent  l'afflig-e  et  le  presse  ; 
Dans  l'avenir  toujours  placé. 
Son  bonheur  recule  sans  cesse  ; 
Il  meurt  en  rêvant  le  repos. 
Si  quelque  douceur  passag^ère 
Un  moment  console  ses  maux , 
C'est  une  rose  solitaire 
Qui  fleurit  parmi  des  tombeaux. 
Toi ,  dont  la  puissance  ennemie 
Sans  choix  nous  condamne  à  la  vie , 
Et  proscrit  l'homme  en  le  créant, 
Jupiter,  rends-moi  le  néant.  » 
Aux  bords  lointains  de  la  Tauride , 
Et  seul  sur  des  rochers  déserts 
Qui  repoussent  les  flots  amers , 
Ainsi  parlait  Éphimécide. 


N".  4i8. 


CICERO    GROS    OEIL. 

Pour  me  montrer  le  caractère  d'une  fleur,  les 
botanistes  me  la  font  voir  sèche ,  décolorée  et  éten- 
due dans  un  herbier.  Est-ce  dans  cet  état  que  je  re- 
connaîtrai un  lis?  N'est-ce  pas  sur  le  bord  d'un 
ruisseau,  élevant  au  milieu  des  herbes  sa  tige  au- 
guste ,  et  réfléchissant  dans  les  eaux  ses  beaux  cahces 
plus  blancs  que  l'ivoire  que  j'admirerai  le  roi  des 
vallées?  Sa  blancheur  incomparable  n'est-elle  pas 
encore  plus  éclatante  quand  elle  est  mouchetée, 
comme  des  gouttes  de  corail,  par  de  petits  scara- 
bées écartâtes,  hémisphériques,  piquetés  de  noir, 
qui  y  cherchent  presque  toujours  un  asile?  Qui  est- 
ce  qui  peut  reconnaître  dans  une  rose  sèche  la 
reine  des  fleurs?  Pour  qu'elle  soit  à  la  fois  un  objet 
d'amour  et  de  philosophie ,  il  faut  la  voir  lorsque , 
sortant  des  fentes  d'un  rocher  humide,  elle  brille 

CICÉRO    GROS    OEIL    ITALIQUE. 

sur  sa  propî^e  verdure ^  que  le  zéphyr  la  balance  sur 
sa  tige  hérissée  à'^ épines,  que  V aurore  Va  couverte 
de  pleurs,  et  qu^elle  appelle  par  son  éclat  et  par  ses 
parfums  la  main  des  amants.  Quelquefois  une  can- 
tharide,  nichée  dans  sa  corolle,  en  relève  le  carmin 
par  son  vert  d'émeraude:  c^est  alors  que  cette  fleur 


\o-\  i558.   loog. 


SAINT-AUGUSTIN. 

N^   IV. 

C'est  une  étrange  manie^  c'est  un  déplo- 
rable aveuglement  que  celui  qui  anime  ainsi 
les  ims  contre  les  autres  des  hommes  qu'un 
même  but^  un  sentiment  indestructible^  de- 
vraient^ au  milieu  des  débats  les  plus  achar- 
nés^ toujours  rapprocher^  toujours  réunir; 
des  hommes  qui  substituent  ainsi  l'irascibilité 
de  l'amour-propre  au  culte  de  la  patrie^  et 
se  livrent  les  uns  les  autres  aux  préventions 
populaires!  Et  moi  aussi^  on  voulait^  i"  y  ^ 
peu  de  jours^  me  porter  en  triomphe^  et 
maintenant  on  crie  dans  les  rues:  La  grande 
trahison  de  Mirabeau!  Je  n'avais  pas  besoin 
de  cette  leçon  pour  savoir  qu'il  y  a  peu  de 

SAINT-AVGUSTIN  ITALIQUE. 

distance  du  Capitale  à  la  roche  Tarpéienne. 
Mais  r homme  qui  combat  pour  la  raison, 
pour  la  patrie,  ne  se  tient  pas  si  aisément 
pour  vaincu.  Celui  qui  a  la  conscience  d'avoir 
bien  mérité  de  son  pays,  et  surtout  de  lui 


18.    i5Go.      Gravé  par  Istaslouk 


SAINT-AUGUSTIN  ITALIQUE, 

FONTENAY, 

Désert  y  aimable  solitude, 
Séjour  du  calme  et  de  la  paix, 
Asile  où  n^  entrèrent  jamais 
Le  tumulte  et  V inquiétude, 

Quoi!  f  aurai  tant  de  fois  chanté. 
Aux  tendres  accords  de  ma  lyre, 
Tout  ce  qu^on  souffre  sous  V empire 
De  V amour  et  de  la  beauté; 

Et,  plein  de  la  reconnoissance 
De  tous  les  biens  que  tu  m^as  faits. 
Je  laisserai  dans  le  silence 
Tes  agréments  et  tes  bienfaits! 

Oest  toi  qui  me  rends  à  moi-même. 

Tu  calmes  mon  cœur  agité. 

Et  de  ma  seule  oisiveté 

Tu  me  fais  un  bonheur  extrême. 


N".  44g.     Gravé  par  Istastoule.  Cette  italique  ne  se  trouve  pas  dans  le  spécimen  de  Gando, 


GROS    CANON    ALLONGÉ. 

Gillé  fils  succède  à 
son  père  comme  fon- 
deur, et  apporte  des 
modifications  aux  ca- 
ractères d  écriture.  Il 
fait  exécuter  un  grand 
nombre  de  fleurons. 


N".  534. 


LETTRES     GRASSES 

GRAVÉES   PAR  ISTASTOULE. 


CINC    COMPACT    ROMAIN. 


lorsque  j'étais  en  pleine  mer ,  et  que  je  n'avais  d'autre  spectacle  que  le  ciel  et 
l'eau,  je  m'amusais  quelquefois  à  dessiner  les  beaux  nuages  blancs  et  gris,  sem- 
blables à  des  groupes  de  montagnes ,  qui  voguaient  à  la  suite  les  uns  des  autres 
sur  l'azur  des  cieui.  C'était  surtout  vers  la  fin  du  jour  qu'ils  développaient  toute 
leur  beauté  en  se  réunissant  au  couchant ,  où  ils  se  revêtaient  des  plus  riches  cou- 
leurs et  se  combinaient  sous  les  formes  les  plus  magnifiques. 

Un  soir ,  environ  une  demi-heure  avant  le  coucher  du  soleil ,  le  vent  alizé  du 
sud-est  se  ralentit ,  comme  il  arrive  d'ordinaire  vers  ce  temps.  Les  nuages ,  qu'il 
voiture  dans  le  ciel  à  des  distances  égales  comme  son  souffle ,  devinrent  plus  rares, 
et  ceux  de  la  partie  de  l'ouest  s'arrêtèrent  et  se  groupèrent  entre  eux  sous  les 
formes  d'un  paysage.  Ils  représentaient  une  grande  terre  formée  de  hautes  mon- 
tagnes ,  séparées  par  des  vallées  profondes ,  et  surmontées  de  rochers  pyramidaux. 
Sur  leurs  sommets  et  leurs  flancs  apparaissaient  des  brouillards  détachés ,  sem- 
blables à  ceux  qui  s'élèvent  des  terres  véritables.  Un  long  fleuve  semblait  circuler 
dans  leurs  vallons  et  tomber  çà  et  là  en  cataractes  ;  il  était  traversé  par  un  grand 
pont ,  appuyé  sur  des  arcades  à  demi  ruinées.  Des  bosquets  de  cocotiers ,  au  centre 
desquels  on  entrevoyait  des  habitations ,  s'élevaient  sur  les  croupes  et  les  profils 
de  cette  ile  aérienne. 


SEPT    COMPACT    ROMAIN. 

En  effet,  dès  que  l'astre  du  jour  se  fut  caché  derrière  lui,  quelques- 
uns  de  ses  rayons  décomposés  éclairèrent  les  arcades  demi-transpa- 
rentes du  pont  d'une  couleur  ponceau,  se  reflétèrent  dans  les  vallons 
et  au  sommet  des  rochers,  tandis  que  des  torrents  de  lumière  cou- 
vraient ses  contours  de  l'or  le  plus  pur ,  et  divergeaient  vers  les  cieux 
comme  les  rayons  d'une  gloire  ;  mais  la  masse  entière  resta  dans  sa 
demi-teinte  obscure ,  et  on  voyait  autour  des  nuages ,  qui  s'élevaient 
de  ses  flancs,  les  lueurs  des  tonnerres  dont  on  entendait  les  roule- 
ments lointains.  On  aurait  juré  que  c'était  une  terre  véritable,  située 
environ  à  une  lieue  et  demie  de  nous.  Peut-être  était-ce  une  de  ces 
réverbérations  célestes  de  quelque  île  très-éloignée ,  dont  les  nuages 
nous  répétaient  la  forme  par  leurs  reflets ,  et  les  tonnerres  par  leurs 
échos. 

SEPT    COMPACT    ITALIQUE. 

Plus  d'une  fois  des  marins  expérimentés  ont  été  trompés  par  de  sem- 
blables aspects.  Quoi  qu'il  en  soit,  tout  cet  appareil  fantastique  de 
magnificence  et  de  terreur,  ces  montagnes  surmontées  de  palmiers,  ces 
orages  qui  grondaient  sur  leurs  sommets,cefeuve,  ce  pont,  tout  fondit 
et  disparut  à  l'arrivée  de  la  nuit,  comme  les  illusions  du  monde  à 
l'approche  de  la  mort. 


de  Guiido. 


f.    L'ili.li.jiie    iK 


GROS    ROMAIN. 

Henri  Fournîer^  élèye  et  prote 
chez  M.  M.  Firniin  Didot^  puis  im- 
primeur à  Paris  ^  publie  un  Traité 
de  Typographie  qui  contient  de 
bonnes  instructions  pratiques,  liais 
cet  art  fait  tant  de  progi'ès^  qu*une 
partie  des  préceptes  quïl  donne  est 
déjà  tombée  en  désuétude.  L'im- 
pression qu*il  a  faite  des  fables  de  La 
Fontaine  illustrées  par  Grandyille 
est  remarquable. 

GROS  no  MA  IN  ITALIQUE, 

Firmin  Dldot^  fils  d^Amhroise  et 
frère  de  Pierre^  succède  à  son  père 
pour  la  fonderie j  qu^il  avait  enrichie 
de  ses  types  élégants. 


N"".    1;S.    î-f).      Piol.al.leiaent   iira\c  par   I>la,toule. 


GROS    PARANGON. 

Les  caractères  appelés 
microscopiques,  gravés  et 
fondus  par  M.  Henri  Di- 
dot,  à  Fàge  de  soixante-six 
ans,  paraissent  pour  la  pre- 
mière fois  dans  l'édition  des 
„Maximes"  de  La  Roche- 
foucauld, imprimé  par  Di- 
dot  jeune. 

GROS  PARANGON  ITALIQUE. 

Jamais  dans  aucun  pays 
rien  de  semblable,  n'avait 
été  exécuté  9  à  beaucoup 
prés. 


jG.    5oj.      Gravé   jtar   Istasloule. 


PETIT    CANON. 

Thompson,  habile 
graveur  sur  bois,  exé- 
cute avec  un  talent 
remarquable  des  vig- 
nettes supérieures  à 
ce  qui  avait  été  fait 
jusqu'alors  en  France. 

PETIT  CANON  ITALIQUE. 

Parmi  les  nombreux 
artistes  français  qui 
se  sont  formés  à  son 
école. 


N*'^   5i6.   5i;.      Gravé   par   Istastoule. 


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LETTRES  DE  DEUX  POINTS. 


Deux  points  de  Mignonne. 

A.  CHAPELLE,  GRAVEUR  À 
BRUXELLES  PLUS  TARD  À  PARIS. 

Deux  points  de  Petit-Texte. 

FONDERIE  SOCIÉTÉ 
NATIONALE  À  BRUXELLES. 

Deux  points  de  Petit-Romain. 

ISTASTOULE,  GRAVEUR 
À  BRUXELLES. 

Deux  points  de  Philosophie. 

HENRI  YILLENEUYE 
GRAVEUR  À  LIÈGE. 

Deux  points  de  Cicéro. 

T.  SIMON  GANDO 
À  BRUXELLES. 


N«s.  737.  736.  747.  746.  745. 


Deux  points  de  Nompareille. 


HACHETTE,  ANCIEN  ÉLÈVE  DE  L'ÉCOLE 

NORMALE,  EST  NOMMÉ  LIBRAIRE.  IL  A  ÉTÉ 

NOMMÉ  IMPRIMEUR  DE  L'UNIVERSITÉ 

Deux  points  de  Gaillarde. 

AMBROISE  FIRMIN 
DIDOT  EST  NOMMÉ  IM- 
PRIMEUR DU  ROI 

Deux  points  de  Augustin. 

LOMBARDAT 
À  PARIS 

Deux  points  de  Gros-Romain. 

DOUBLET 


V"".  738.  j35.  734.  733. 


Capitales  de  Nompareille. 

ANT.  FRANÇOIS  MOMORO ,  GENDRE  ET  SUCCESSEUR  DE  J.  F. 
FOURNIER  LE  JEUNE,  FONDEUR  ET  GRAVEUR  PUBLIE  UN  „TRAITB 
ELEMENTAIRE  D'IMPRIMERIE".  MOMORO  MOURUT  SUR  L'ECHAFAUD 
AVEC  HEBERT. 

Capitales  de  Nompareille. 

PINARD  QUI  S^ÉTAIT  DISTINGUÉ  À  BORDEAUX  COMME  IMPRIMEUR, 
GRAVEUR  ET  FONDEUR  EN  CARACTÈRES,  ET  QUI  S'ÉTAIT  FORMÉ 
À  L'ÉCOLE  DE  FIRMIN  DIDOT,  TRANSPORTE  SON  ÉTABLISSEMENT  À 
PARIS. 

Capitales  de  Petit-Texte. 

GUII.I1AUME  I.E  BÉ,  céliÈBRE  GRAVEUR  ET  FONDEUR 
EN  CARACTÈRES.  II.  A  ACHETÉ  I.ES  POINÇONS  ET  LES 
MATRICES    DE  I.A  FONDERIE  DE  CLAUDE  GARAMOND. 


Capitales  de  Petit-Romain. 

PIERRE  DIDOT  PUBLIE  LA  MAGNIFIQUE 
ÉDITION  DE  RACINE,  QUI  A  ÉTÉ  PROCLAMÉ 
COMME  LE  CHEF-D'ŒUYRE  DE  LA  TYPO- 
GRAPHIE. 

Deux  points  de  Nompareille. 

LE  GRAND,  LE  GRAVEUR  DE 

NOUVEAUX  TYPES  DE 

L'UKEPRIMERIE  NATIONALE. 


Deux  points  de  Petit-Texte. 

BERTRAND  LOEULLIET 
GRAVEUR  À  PARIS. 


N"*.  11 38.   ,56;.   ,5G8.   ,.48.   i.iî.   iiH. 

Ui   «««ortiinents    n"*.    ii38    et    ii48    sont   gravé.s    par   A.    Veyial.    N".    ii'ii   jmr  Istastoiilf.    ^".    11 '«3    \>.\r   A.   I»in:ii.l. 

Le  u".   Il 38  ne  se  trouve  pas  dans  le  spécimen  de  Gando. 


FANTAISIES. 


Deux-points  de  Nompareille  ombrées. 


Italienne,  deux-points  Nompareille. 


Italienne,  deux-points  Petit-Text. 

FZEKin  DIDOT 
FILS  D'AKBItOZSB 


N"*.  1256.   1239.  i24o. 


Deux  points  de 

Yompareille 

ombrées. 

ir.  ©, 

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WMtê  UlS<&<&kWÈ                     1 

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De 

ux  points  de  Petit-Texte  ombrées.                                                 1 

(giaiiiâïLii 

^ItAlPllLlËIÎ                1 

^mniâi 

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ilDllPla 

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ux  points  de  Philosophie 

ombrées. 

Deux  points  de  Cicéro  ornées. 


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N'".   i'^i2.   iix\.   i^i'i.   iiç)C). 

U»   assortiments    n"*,    iSaB,    iBai,    l'j.çjG    sont  gravés   pur   A.   Veynit  ,   le   n".    »:fi:>   \y.\r  l>lii>t..iilr.     !.«•   i>".    >3ii    ■"■   -«• 

luve  pas  dans  le  spécJinen  de  Gando. 


Deux  points  de  Cicéro  ornées. 


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Deux  points  de  St.  Augustin  ornées. 


Deux  points  de  Gros-Romain  azurées. 

J*  G*  GILLE 
FONDEUR. 


Deux  points  de  Parangon  ornées. 


N^s.  i3o5.  129;.  ,290.   i3o6. 

Les  assortiments  u"*.    l'^oS,    129-   et    i3oG  sont   giavés   par  Dallut,  le  u°.    1290   par   Istasioule. 


GOTHIQUES. 


Gothique  ornée  de  Gros-Parangon. 


be    ^3)X0s^xomm^    be    Sg^iceto^    bc 
(^^t^nonne  |V  frout^mf  j^n^  C0t|j5  bott-- 


N".  i381 


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Gothique  Allemande  de  Philosophie. 

®»m  bien  dtnbïxoït  aux  armjes, 
blutant  qxxa  "bamte  tkivotr^ 
(ffn  France  Von  vttriifroït  pour  noir 
IDf  hon&  et  vittnmx  ;gntîrarmfs. 
iptnù}-von&  x(ttje  Jbrtttt  it  vacaxme&^ 
Uï  jouftfs  Von  jcrat^îttft  arotr, 
€Xm  btjfît  jcftubiroit  awi  arm£S 
blutant  i{na  irantjes  'bkivoivl 

Cjertfs  ntnnvy  mais  attx  alarmas 
En  â\acnn  ùtoit  (on  'bivo'n^ 
(&t  pourtant  jt  fais  à  fcaDoir, 
Concluant  fur  mea  pr^mijers  tjerntjes, 
€Xut  bien  fftuïrtrott  aux  arnijes, 
blutant  ^u  à  bam^s  hkevoit^ 
(&n  /rancÉ  l'on  Btjenbrolt  pour  uoir 
Wî  bons  jet  rertttjeux  ;gntlrarm^s. 


i362. 


Gothique  Allemande  de  Saint-Augustin. 

^imm  foi  tji^amtt  qui  f  outrai 

}pitt0  nt  mUn  fjonrtjorit  Unir; 

Jlmionrtnx  mt  iant  ^je^jenir: 

2t  nt  fçat0  qn%  m^m  amtnlora. 

(Ecmbicn  qnt  )t  fçaq  ^je  y iiça 

tfluVn  amours  faut  maint©  maujE  {oniirïr; 

^xtnnt  iox  Vamtr  qui  yxrurra: 

|pitt0  nt  vcCtn  Tfonrrox\t  itnxr. 

aXion  canr^  )trjet)ant-|)iier  auoxnïa 
^tanït  jqui  tant  it  fcait  c\^trir^ 
CSttne  'bWit  nt  mni  iDfipartir. 
€'t{i  Mil  xi  tùixtntiitra. 
^xtnnt  iox  tr^antjer  (\nx  pxxnrra: 
îpitt0  ne  xnUn  Tfonrrox\t  itnxr. 


Gothique  Allemande  de  Petit-Parangon. 

Cljttttfon. 

^oua  liberté  'iféîkét, 
Béeiït,  où  t'te-tu  rdivée 
iûXe  laiffant  m  captivité^ 
^éiasl  île  mox)  ne  te  îiétournc! 
Mctournc,  à  liberté,  retourne, 
Retourne,  à  îioure  liberté! 

Don  îiéport  m'a  trop  fait  ronnoiftre 
Ce  bonl)eur  oit  je  foulots  eftre, 
(îiîluonïi  ÎJoure  tn  m'oUois  guidant; 
©t  xfue,  fans  languir  ÎJaoantage, 
Je  ÎJetiois,  fi  j'euffe  été  fo^ge, 
UerîJre  la  oie  en  te  perdant. 


X".  i3Gi. 


Gothique  Allemande  de  Petit-Parangon. 

Ce  €oq  et  le  Henarîi. 

Ce  rettûrîr,  par  bois  errant, 

ba  qucrant, 
|3our  fa  bent  tenîire  pafture, 
(Bt  fi  loin  en  la  fin  va, 

^u'il  troutja 
Ce  toq  par  méfatjenture. 

Ce  foq,  île  granb'  peur  qu'il  a, 

Ô'enuola 
0ur  une  ente  l)aute  et  belle, 
mifant  que  maiftrc  renarîi 

n'a  pas  Vaxi 
ÎDe  monter  îieffus  icelle. 


i^«; 


Gothique  x4.11emancle  Je  Parangon. 


£c  xcTffoSy  ks  \mx^  la  Ikfft, 
£t  Tpm  U  îoin  ^'une  jeumffi^, 
Ct  tom  Ub  platto  mont  iaiffé; 
JHaintmant  rien  ne  me  peut  plaire, 
Sin^n,  html  et  f^litaire, 
3l^0rer  l'œil  ijui  m'a  bleffé. 

€luel  cijarme,  m  quel  ^ieu  plein  îi'enuie 
%  cljani^é  ma  première  uie, 
Ca  comblant  ^'infelicite? 
Ct  t0i|,  liberté  ^efirée, 
iDeefle,  m  t'e$-tu  retirée? 
Ïlet0urne,  o  hona  liberté! 


N''.   iV'u. 


É 


Gothique  Allemande  de  Gros-Parangon. 

JUiftant  la  Saône 
ÎBtt  Eljône 
Une  Itene  on  mmxon, 
mt  rifle, 
Cifle  gentille, 
SDelïans  fon  moite  giron, 

CDù  Tenfant 

€ant  triompljant, 

|3ar  fa  mort  trop  plus  qu  amère, 

%  îre0  antel0 

Jmmortek, 
Pour  foi,  fa  granîr,  et  fa  mère. 


liïG*) 


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TAROTES, 


N°.  1. 


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»i'  *î»î*  ''*'  '•*'  ''*',  ''*' 
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N°.  3. 


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N^  4. 

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N°.  5. 


N°.  6. 


N".  7. 


N°.  8. 


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N"».  4»8i.  4494.  446i.  446o.  i634.  i635.  i43i 


EPREUVES 

DES    CARACTÈRES 

DE    LA    FONDERIE 

DE  TH.  S.   GANDO, 

FONDEUR  A  BRUXELLES. 


SECOND     RECUEIL. 


I 


ROMAINS  ET  ITALIQUES. 


MIGNONNE. 

Qui  pourrait  décrire  les  mouvements  que  l'air  communique  aux  végétaux? 
Combien  de  fois,  loin  des  villes,  dans  le  fond  d'un  vallon  solitaire  couronné 
d'une  forêt,  assis  sur  le  bord  d'une  prairie  agitée  des  vents,  je  me  suis  plu  à 
voir  les  mélilots  dorés ,  les  trèfles  empourprés ,  et  les  vertes  graminées ,  former 
des  ondulations  semblables  à  des  flots ,  et  présenter  à  mes  yeux  une  mer  agitée 
de  fleurs  et  de  verdure!  Cependant  les  vents  balançaient  sur  ma  tète  les  cimes 
méyestueuses  des  arbres.  Le  retroussis  de  leur  feuillage  faisait  paraître  chaque 
espèce  de  deux  verts  différents.  Chacun  a  son  mouvement.  Le  chêne  au  tronc 
raide  ne  courbe  que  ses  branches ,  l'élastique  sapin  balance  sa  haute  pyramide , 
le  peuplier  robuste  agite  son  feuillage  mobile ,  et  le  bouleau  laisse  flotter  le  sien 
dans  les  airs  comme  une  longue  chevelure.  Ils  semblent  animés  de  passions. 
L'un  s'incline  profondément  auprès  de  son  voisin ,  comme  devant  un  supérieur  ; 
l'autre  semble  vouloir  l'embrasser  comme  un  ami;  un  autre  s'agite  en  tous 
sens ,  comme  auprès  d'un  ennemi.  Le  respect ,  l'amitié ,  la  colère  semblent  passer 
tour  à  tour  de  l'un  à  l'autre  comme  dans  le  cœur  des  hommes ,  et  ces  passions 
versatiles  ne  sont  au  fond  que  les  jeux  des  vents.  Quelquefois  un  vieux  chêne 
élève  au  milieu  d'eux  ses  longs  bras  dépouillés  de  feuilles  et  immobiles.  Comme 
un  vieillard ,  il  ne  prend  plus  de  part  aux  agitations  qui  l'environnent  ;  il  a 
vécu  dans  un  autre  siècle.  Cependant  ces  grands  corps  insensibles  font  entendre 
des  bruits  profonds  et  mélancoliques.  Ce  ne  sont  point  des  accents  distincts  :  ce 
sont  des  murmures  confus,  comme  ceux  d'un  peuple  qui  célèbre  au  loin  une 
fête  par  des  acclamations.  Il  n'y  a  point  de  voix  dominante  :  ce  sont  des  sons 
monotones ,  parmi  lesquels  se  font  entendre  des  bruits  sourds  et  profonds ,  qui 
nous  jettent  dans  une  tristesse  pleine  de  douceur.  Ainsi  les  murmures  d'une 
forêt  accompagnent  les  accents  du  rossignol,  qui  de  son  nid  adresse  des  vœux 
reconnaissants  aux  amours. 

MIGNONNE    ITALIQUE. 

C'est  un  fond  de  concert  qui  fait  ressortir  les  chants  éclatants  des 
oiseaux,  comme  la  douce  verdure  est  un  fond  de  couleurs  sur  lequel  se 
détache  l'éclat  des  fleurs  et  des  fruits.  Ce  bruissement  des  prairies ,  ces 
gazouillements  des  bois,  ont  des  charmes  que  je  pré f ère  aux  plus  bril- 
lants accords;  mon  âme  s'y  abandonne ,  elle  se  berce  avec  les  feuillages 
ondoyants  des  arbres,  elle  s'élève  avec  leur  cime  vers  les  deux ,  elle  se 
transporte  dans  les  temps  qui  les  ont  vus  naître  et  dans  ceux  qui  les 
verront  mourir  ;  ils  étendent  dans  l'infini  mon  existence  circonscrite  et 
fugitive.  Il  me  semble  qu'ils  me  parlent,  comme  ceux  de  Dodone,  un 
langage  mystérieux;  ils  me  plongent  dans  d'ineffables  révertes,  qui 


N"*".    i54.    i55.     Gravé  par  LoiubarJal. 


PETIT    TEXTE. 

Il  faut  être  heureux ,  cher  Emile  ;  c'est  la  fin  de  tout  être  sensible  ; 
c'est  le  premier  de'sir  que  nous  imprima  la  nature,  et  le  seul  qui  ne 
nous  quitte  jamais.  Mais  où  est  le  bonheur?  qui  le  sait?  Chacun  le 
cherche,  et  nul  ne  le  trouve.  On  use  la  vie  à  le  poursuivre,  et  l'on 
meurt  sans  l'avoir  atteint.  Mon  jeune  ami,  quand  à  ta  naissance  je  te 
pris  dans  mes  bras ,  et  qu'attestant  l'Etre  suprême  de  l'engagement  que 
j'osai  contracter  je  vouai  mes  jours  au  bonheur  des  tiens ,  savois-je  moi- 
même  à  quoi  je  m'engageois  ?  non  :  je  savois  seulement  qu'en  te  rendant 
heureux  j'étois  sûr  de  l'être.  En  faisant  pour  toi  cette  utile  recherche, 
je  la  rendois  commune  à  tous  deux. 

Tant  que  nous  ignorons  ce  que  nous  devons  faire ,  la  sagesse  consiste 
à  rester  dans  l'inaction.  C'est  de  toutes  les  maximes  celle  dont  l'homme 
a  le  plus  grand  besoin ,  et  celle  qu'il  sait  le  moins  suivre.  Chercher  le 
bonheur  sans  savoir  où  il  est,  c'est  s'exposer  à  le  fuir;  c'est  courir 
autant  de  risques  contraires  qu'il  y  a  de  routes  pour  s'égarer.  Mais  il 
n'appartient  pas  à  tout  le  monde  de  savoir  ne  point  agir.  Dans  l'inqm- 
étude  où  nous  tient  l'ardeur  du  bien-être,  nous  aimons  mieux  nous 
tromper  à  le  poursuivre,  que  de  ne  rien  faire  pour  le  chercher;  et, 
sortis  une  fois  de  la  place  où  nous  pouvons  le  connoître ,  nous  n'y  sa- 
vons plus  revenir. 

Avec  la  même  ignorance  j'essayai  d'e'viter  la  même  faute.  En  prenant 
soin  de  toi ,  je  re'solus  de  ne  pas  faire  un  pas  inutile  et  de  t'empêcher 
d'en  faire.  Je  me  tins  dans  la  route  de  la  nature ,  en  attendant  qu'elle 
me  montrât  celle  du  bonheur.  Il  s'est  trouvé  qu'elle  étoit  la  même ,  et 
qu'en  n'y  pensant  pas  je  l'avois  suivie. 

PETIT    TEXTE    ITALIQUE. 

Sois  mon  témoin,  sois  m^n  juge;  je  ne  te  récuserai  jamais.  Tes 
premiers  ans  n'ont  point  été  sacrifiés  à  ceux  qui  les  dévoient  suivre  ; 
tu  as  joui  de  tous  les  biens  que  la  nature  t'apoit  donnés.  Des  maux 
auxquels  elle  t'assujettit,  et  dont  j'ai  pu  te  garantir,  tu  n'as  senti 
que  ceux  qui  pouvoient  t' endurcir  aux  autres.  Tu  rien  as  jamais 
souffert  aucun  que  pour  en  éviter  un  plus  grand.  Tu  n'as  connu  ni 
la  haine,  ni  l'esclavage.  Libre  et  content,  tu  es  resté  juste  et  bon; 
car  la  peine  et  le  vice  sont  inséparables ,  et  jamais  l'homme  ne 
devient  méchant  que  lorsqu'il  est  malheureux. 


N"*".  ao8.  aog.     Probablement  de  la  fonderie  de  Gando. 


PETIT    TEXTE. 

Lorsque  j'étais  en  pleine  mer,  et  que  je  n'avais  d'autre  spectacle  que 
le  ciel  et  l'eau,  je  m'amusais  quelquefois  à  dessiner  les  beaux  nuages 
blancs  et  gris,  semblables  à  des  groupes  de  montagnes,  qui  voguaient  à 
la  suite  les  uns  des  autres  sur  l'azur  des  cieux.  C'était  surtout  vers  la  fin 
du  jour  qu'ils  développaient  toute  leur  beauté  en  se  réunissant  au  cou- 
chant, où  ils  se  revêtaient  des  plus  riches  couleurs  et  se  combinaient 
sous  les  formes  les  plus  magnifiques.  Un  soir,  environ  une  demi-heure 
avant  le  coucher  du  soleil ,  le  vent  alizé  du  sud-est  se  ralentit,  comme  il 
arrive  d'ordinaire  vers  ce  temps.  Les  nuages,  qu'il  voiture  dans  le  ciel  à 
des  distances  égales  comme  son  souffle,  devinrent  plus  rares,  et  ceux  de 
la  partie  de  l'ouest  s'arrêtèrent  et  se  groupèrent  entre  eux  sous  les  for- 
mes d'un  paysage.  Ils  représentaient  une  grande  terre  formée  de  hautes 
montagnes,  séparées  par  des  vallées  profondes,  et  surmontées  de  rochers 
pyramidaux.  Sur  leurs  sommets  et  leurs  flancs  apparaissaient  des  brouil- 
lards détachés,  semblables  à  ceux  qui  s'élèvent  des  terres  véritables.  Un 
long  fleuve  semblait  circuler  dans  leurs  vallons  et  tomber  çà  et  là  en  ca- 
taractes; il  était  traversé  par  un  grand  pont,  appuyé  sur  des  arcades  à 
demi  ruinées.  Des  bosquets  de  cocotiers,  au  centre  desquels  on  entre- 
voyait des  habitations,  s'élevaient  sur  les  croupes  et  les  profils  de  cette 
île  aérienne.  Tous  ces  objets  n'étaient  point  revêtus  de  ces  riches  teintes 
de  pourpre,  de  jaune  doré,  de  nacarat,  d'émeraude,  si  communes  le  soir 
dans  les  couchants  de  ces  parages;  ce  paysage  n'était  point  un  tableau 
colorié:  c'était  une  simple  estampe,  où  se  réunissaient  tous  les  accords 
de  la  lumière  et  des  ombres.  Il  représentait  une  contrée  éclairée,  non  en 
face,  des  rayons  du  soleil,  mais,  par  derrière,  de  leurs  simples  reflets. 

PETIT    TEXTE    ITALIQUE. 

En  effet,  dès  que  Vastre  du  jour  se  fut  caché  derrière  lui ,  quel- 
ques-uns de  ses  rayons  décomposés  éclairèrent  les  arcades  demi- 
transparentes  du  pont  d'une  couleur  ponceau,  se  reflétèrent  dans 
les  vallons  et  au  som^met  des  rochers ,  tandis  que  des  torrents  de 
lumière  couvraient  ses  contours  de  Vor  le  plus  pur,  et  divergeaient 
vers  les  cieux  com^me  les  rayons  d'une  gloire-,  m^ais  la  m^sse en- 
tière resta  dans  sa  demi-teinte  obscure ,  et  on  voyait  autour  des 
nuages,  qui  s'élevaient  de  ses  flancs,  les  lueurs  des  tonnerres  dont 
on  entendait  les  roulements  lointains. 


if)G.    19-.      Gravé   par  Loinltardat. 


GAILLARDE. 

Quand  nous  eûmes  doublé  le  cap  de  Bonne-Espérance,  et  que 
nous  vîmes  l'entrée  du  canal  de  Mozambique,  le  23  de  juin,  vers  le 
solstice  d'été,  nous  fûmes  assaillis  par  un  vent  épouvantable  du 
sud.  Le  ciel  était  serein,  on  n'y  voyait  que  quelques  petits  nuages 
cuivrés,  semblables  à  des  vapeurs  rousses,  qui  le  traversaient  avec 
plus  de  vitesse  que  celle  des  oiseaux.  Mais  la  mer  était  sillonnée 
par  cinq  ou  six  vagues  longues  et  élevées,  semblables  à  des  chaînes 
de  collines,  espacées  entre  elles  par  de  larges  et  profondes  vallées. 
Chacune  de  ces  collines  aquatiques  était  à  deux  ou  trois  étages.  Le 
vent  détachait  de  leurs  sommets  anguleux  une  espèce  de  crinière 
d'écume ,  où  se  peignaient  çà  et  là  les  couleurs  de  l'arc-en-ciel.  Il 
en  emportait  aussi  des  tourbillons  d'une  poussière  blanche  qui  se 
répandait  au  loin  dans  leurs  vallons,  comme  celle  qu'il  élève  sur 
les  grands  chemins  en  été...  Ce  qu'il  y  avait  de  plus  redoutable, 
c'est  que  quelques  sommets  de  ces  collines,  poussés  en  avant  de 
leurs  bases  par  la  poussière  du  vent,  se  déferlaient  en  énormes 
voûtes,  qui  se  roulaient  sur  elles-mêmes  en  mugissant  et  en  écu- 
mant,  et  eussent  englouti  le  plus  grand  vaisseau  s'il  se  fût  trouvé 
sous  leurs  ruines.  L'état  de  notre  vaisseau  concourait  avec  celui  de 
la  mer  à  rendre  notre  situation  affreuse.  Notre  grand  mât  avait  été 
brisé  la  nuit  par  la  foudre,  et  le  mât  de  misaine,  notre  unique 
voile,  avait  été  emporté  le  matin  par  le  vent. 

GAILLARDE    ITALIQUE. 

Le  vaisseau,  incapable  de  gouverner,  voguait  en  travers, 
jouet  du  vent  et  des  lames.  J'étais  sur  le  gaillard  d'arrière, 
me  tenant  accroché  aux  hauteurs  du  mât  d'artimon,  tâ- 
chant de  me  familiariser  avec  ce  terrible  spectacle.  Quand 
une  de  ces  montagnes  approchait  de  nous,  j'en  voyais  le 
sommet  à  la  hauteur  de  nos  huniers,  c'est-à-dire  à  plus  de 
cinquante  pieds  au-dessus  de  ma  tête:  mais  la  base  de 
cette  effroyable  digue  venant  à  passer  sous  notre  vaisseau 


rrave   par 


Loinbardat. 


PETIT    ROMAIN. 

L'écureuil  est  un  joli  petit  animal  qui  n'est  qu'à  demi  sau- 
vage ,  et  qui ,  par  sa  gentillesse ,  par  sa  docilité ,  par  l'inno- 
cence même  de  ses  mœurs,  mériteroit  d'être  épargné  ;  il  n'est 
ni  carnassier  ni  nuisible,  quoiqu'il  saisisse  quelquefois  des 
oiseaux;  sa  nourriture  ordinaire  sont  des  fruits,  des  aman- 
des, des  noisettes,  de  la  faine  et  du  gland;  il  est  propre,  leste, 
vif,  très-alerte,  très-éveillé ,  très-industrieux;  il  a  les  yeux 
pleins  de  feu,  la  physionomie  fine,  le  corps  nerveux,  les 
membres  très-dispos:  sa  jolie  figure  est  encore  rehaussée, 
parée  par  une  belle  queue  en  forme  de  panache ,  qu'il  relève 
jusque  dessus  sa  tête,  et  sous  laquelle  il  se  met  à  l'ombre.  Il 
est,  pour  ainsi  dire,  moins  quadrupède  que  les  autres;  il  se 
tient  ordinairement  assis  presque  debout,  et  se  sert  de  ses 
pieds  de  devant,  comme  d'une  main,  pour  porter  à  sa  bouche; 
au  heu  de  se  cacher  sous  terre,  il  est  toujours  en  l'air.  Il  ap- 
proche des  oiseaux  par  sa  légèreté  ;  il  demeure  comme  eux 
sur  la  cime  des  arbres,  parcourt  les  forêts  en  sautant  de  l'un 
à  l'autre,  y  fait  son  nid,  cueille  les  graines,  boit  la  rosée,  et 
ne  descend  à  terre  que  quand  les  arbres  sont  agités  par  la 
violence  des  vents.  On  ne  le  trouve  point  dans  les  champs, 
dans  les  heux  découverts,  dans  les  pays  de  plaine  ;  il  n'approche 

PETIT    ROMAIN    ITALIQUE. 

jamais  des  habitations  ;  il  ne  reste  point  dans  les 
taillis,  mais  dans  les  bois  de  hauteur,  sur  les  vieux 
arbres  des  plus  belles  futaies.  Il  craint  Veau  plus  en- 
core que  la  terre,  et  Von  assure  que  lorsqu'il  faut  la 
passer,  il  se  sert  d'une  écorcepour  vaisseau,  et  de  sa 
queue  pour  voile  et  pour  gouvernail.  Unes  engourdit 
pas,  comme  le  loir,  pendant  V hiver;  il  est  en  tout 


N"'«.  3oo.  3t 


Gravé  par  Luiuburdal. 


PETIT    ROMAIN. 

Aux  avantages  de  la  nature  le  cygne  réunit  ceux  de  la  li- 
berté ;  il  n'est  pas  du  nombre  de  ces  esclayes  que  nous  puis- 
sions contraindre  ou  renfermer;  libre  sur  nos  eaux,  il  n'y 
séjourne,  ne  s'y  établit  qu'en  y  jouissant  d'assez  d'indépen- 
dance pour  exclure  tout  sentiment  de  servitude  et  de  capti- 
vité; il  veut  à  son  gré  parcourir  les  eaux,  débarquer  au 
rivage,  s'éloigner  au  large,  ou  venir,  longeant  la  rive,  s'a- 
briter sous  les  bords,  se  cacher  dans  les  joncs,  s'enfoncer 
dans  les  anses  les  plus  écartées,  puis,  quittant  sa  solitude, 
revenir  à  la  société,  et  jouir  du  plaisir  qu'il  paroît  prendre 
et  goûter  en  s'approchant  de  l'homme ,  pourvu  qu'il  trouve 
en  nous  ses  hôtes  et  ses  amis ,  et  non  ses  maîtres  et  ses  tyrans. 

Chez  nos  ancêtres,  trop  simples  ou  trop  sages  pour  rem- 
plir leurs  jardins  des  beautés  froides  de  l'art,  en  place  des 
beautés  vives  de  la  nature,  les  cygnes  étoient  en  possession 
de  faire  l'ornement  de  toutes  les  pièces  d'eau  ;  ils  animoient, 
égayoient  les  tristes  fossés  des  châteaux;  ils  décoroient  la 
plupart  des  rivières,  et  même  celle  de  la  capitale  ;  et  l'on  vit 
l'un  des  plus  sensibles  et  des  plus  aimables  de  nos  princes 
mettre  au  nombre  de  ses  plaisirs  celui  de  peupler  de  ces 
beaux  oiseaux  les  bassins  de  ses  maisons  royales... 

Les  anciens  ne  s'étoient  pas  contentés  de  faire  du  cygne 
un  chantre  merveilleux;  seul  entre  tous  les  êtres  qui  fré- 
missent à  l'aspect  de  leur  destruction ,  il  chantoit  encore 
au  moment  de  son  agonie,  et  préludoit  par  des  sons  har- 
monieux à  son  dernier  soupir.  C'étoit,  disoient-ils ,  près 
d'expirer,  et  faisant  à  la  vie  un  adieu  triste  et  tendre,  que 
le  cygne  rendoit  ces  accents  si  doux  et  si  touchants,  et 
qui,  pareils  à  un  léger  et  doux  murmure,  d'une  voix  basse, 
plaintive  et  lugubre,  formoient  son  chant  funèbre.  On  en- 
tendoit  ce  chant  lorsqu'au  lever  de  l'aurore  les  vents  et  les 


X».  3< 


Probabltment  de  la   fonderie  de  Gando. 


SAINT-AUGUSTIN. 

Le  lézard  gris  paraît  être  le  plus  doux,  le 
plus  innocent,  et  l'un  des  plus  utiles  des  lé- 
zards. Ce  joli  petit  animal,  si  commun  dans 
le  pays  où  nous  écrivons,  et  avec  lequel  tant 
de  personnes  ont  joué  dans  leur  enfance, 
n'a  pas  reçu  de  la  nature  un  vêtement  aussi 
éclatant  que  plusieurs  autres  quadrupèdes 
ovipares;  mais  elle  lui  a  donné  une  parure 
élégante:  sa  petite  taille  est  svelte,  son  mou- 
vement agile,  sa  course  si  prompte,  qu'il 
échappe  à  l'œil  aussi  rapidement  que  l'oiseau 
qui  vole.  Il  aime  à  recevoir  la  chaleur  du 
soleil;  ayant  besoin  d'une  température  dou- 
ce, il  cherche  les  abris;  et  lorsque,  dans  un 
beau  jour  du  printemps,  une  lumière  pure 
éclaire  vivement  un  gazon  en  pente,  ou 
une  muraille  qui  augmente  la  chaleur  en  la 

SAINT-AUGUSTIN  ITALIQUE. 

réfléchissant,  on  le  voit  s'étendre  sur  ce 
mur,  ou  sur  V herbe  nouvelle,  avec  une  es- 
pèce de  volupté.  Il  se  pénètre  avec  délices 
de  cette  chaleur  bienfaisante,  il  marque 
son  plaisir  par  de  nnolles  ondulations  de 


N»*.   46o.   46i.     Grave  par  LoniLardat. 


GROS   ROMAIN. 

G.  A.  Crapelet  succède  à 
son  père,  imprimeur  estimé. 
Ses  éditions  sont  appréciées  des 
connaisseurs  par  leur  correc- 
tion et  leur  bonne  exécution 
typographique.  Imprimeur  in- 
struit, il  a  publié  plusieurs  ou- 
vrages de  la  langue  françai- 
se au  moyen  âge,  étude  à  la- 
quelle il  s'était  particulièrement 

ITALIQUE. 

A.  F.  MotnorOy  gendre  et 
successeur  de  J.  F.  Fournier 
le  jeune  ^  fondeur  et  graveur ^ 
publie  un   Traité  élémentaire 


N«^   48G.   48;.      Gravé  par  Marcellin  Legrand. 


» 


RONDES. 


FLEURONS  ET  VIGNETTES, 


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1020 

l322 

i336 
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5 


+♦+++**+♦**+***+**♦+**+*+*+♦+♦****++**++**+■**++********♦ 


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1 i 29/30 


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1876 


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I 


SMITHSONIAN  INSTITUTION  LIBRARIES 


3   9088   00619   3510